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Déjantés du ciné
20 février 2008

Tetsuo 1 et 2 par Shinja Tsukamoto

tetsuoTetsuo I the iron man de Shinja Tsukamoto, 1988
Film japonais
Durée du film : 1h07
Acteurs principaux : Tomoro Taguchi, Nobu Kanaoka, Renji Ishibashi, Naomasa Musaka, Kei Fujiwara, Shinja Tsukamoto
Musique : Chu Ishikawa

FICHE IMDB


résumé : suite à un accident, un homme se transforme en monstre métallique.


Impossible de dissocier ces deux films, plus qu'une suite ou un simple remake, Tetsuo II est le nom du jeune biker mutant qui détruisait Tokyo à la fin de Akira (de Otomo). Il incarnait toute la frustration et était le symbole de toutes les forces destructrices.
Dans le Tetsuo de Tsukamoto, c'est un employé-type, comme semble les exécrer le réalisateur, qui va muter en monstre métallique après avoir été contaminé par le cycliste qu'il a renversé en se rendant à un rendez-vous galant.
Tetsuo se présente comme un film avant gardiste, dans la forme et le fond. N'hésitant pas à accumuler les effets expérimentaux, à employer une esthétique underground et trash, Tsukamoto livre là un film mêlant culture manga et esthétique cyberpunk, dans une ambiance frénétique et violente.
Proche d'un Cronenberg pour la froideur de ses plans et pour son goût pour la mutation, Tsukamoto s'en démarque en faisant de celle-ci une étape logique et la technologie : la mutation se traduit par une intrication chair-métal, douloureuse et largement teinté de sadomasochisme.
En effet, si la mutation est vécue comme inéluctable et permet à l'homme de mieux s'exprimer et d'extérioser ses frustrations, il y a toujours chez Tsukamoto l'idée que la souffrance physique est également un moyen de se sentir pleinement vivre dans un monde moderne aseptisé.
A ce titre, Tsukamoto n'a pas son pareil pour peindre Tokyo sous les traits d'une ville froide et inhumaine où les gens errent sans âmes, comme des fantômes. Comme à la fin d'Akira, le mutant, véritable engin de destruction mû autant par la haine que par la frustration, part à l'assaut de Tokyo pour mieux le détruire.

Tetsuo II, le prolongement de Tetsuo, est plus violent et Tsukamoto y expose plus librement le thème de la frustration sexuelle et n'hésite pas à mêler la violence à l'érotisme.
Plus posé que le précédent opus, Tetsuo II voit également sa thématique s'approfondir sans que le style de Tsukamoto y perde de sa force. Ici, le héros est un homme marié, toujours employé-type, qui voit son fils enlevé par une bande de voyous cyber-punk en passe de devenir eux-mêmes mutants. De colère, le héros voit son corps muter en machine de guerre. Aveuglé par cette même colère, il tuera son fils dans un accès de rage incontrôlée. S'ensuit alors la volonté de vengeance du héros qui se retrouvera confronté à une horde de mutants (des hommes canons) transformé par un professeur diabolique.
Si l'histoire paraît abracadabrante, le film n'est pas en reste et réserve de grands moments de bravoure. Le héros est ici porté par sa rage et sa frustration qui le verront muter presque à l'infini tant sa haine est grande, tandis que ses ennemis ne mutent que grâce à une manipulation scientifique aberrante.
A l'origine du pouvoir de mutation du héros, Tsukamoto nous livre une superbe scène primitive montrant, une fois de plus, si besoin était, son penchant pour le morbide et l'érotisme.
Tetsuo et Tetsuo II mêlent les genres : mangas, science-fiction, underground et culture cyberpunk mais également les obsessions : le sexe, la mort, la douleur, le péché, la mutation, la frustration, le fétichisme. Toutes les préoccupations de Tsukamoto, largement teintées de morbide et de violence, sont amplifiées par son gout pour le chaos.
En cela, Tetsuo et Tetsuo II sont de véritables malstrom cinématographiques passant à la moulinette tous les codes établis.
Tsukamoto, élevé au rang de cinéaste culte pour ces films, s'impose également comme un créateur de forme. Comme Cronenberg, on peut dire de lui qu'il est le créateur d'une nouvelle chair, qui serait, chez lui, le fruit d'une hybridation avec la machine. Tsukamoto semble attiré de façon compulsive et morbide par le chaos et la destruction, thèmes omniprésents dans les Tetsuo qui peuvent, de ce point de vue, être considérés comme de véritables oeuvres nihilistes. Alors que le héros du premier Tetsuo ne semble haïr que Tokyo, le héros du second en veut à la société entière.

L'idée de mutation qui serait le fruit de l'expression de la haine ou de la frustration (à l'image d'une somatisation en psychiatrie) montre avant tout la première intrication qui est celle de l'esprit et du corps. Or celui-ci ne mute qu'en fonction du désir et comme il s'agit de tuer ou de détruire, la mutation s'opère sous forme de machine de guerre. A la base de tout se trouve donc le désir ou la frustration.
Les films de Tsukamoto peuvent être perçus comme une échappatoire dans un Japon aux traditions écrasantes et qui se serait modernisé trop vite, au point de devenir inhumain (Tokyo en est le symbole). La rébellion, ou la révolution sera violente (ou ne sera pas) comme le suppose Tsukamoto à travers ses héros qui ne cherchent rien d'autre que la normalité, mais qui évoluent de manière monstrueuse et inhumaine dans un monde froid et hostile, où l'homme n'a plus sa place.

La BA en VO


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