Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Déjantés du ciné
25 février 2008

Veuve mais pas trop... de Jonathan Demme

Veuve_mais_pas_trop Réalisé par Jonathan Demme
Titre original : Married to the Mob
Année : 1988
Origine : Etats-Unis
Durée : 103 minutes
Avec : Michelle Pfeiffer, Matthew Modine, Dean Stockwell, Mercedes Ruehl, Alec Baldwin, Joan Cusack,...

Fiche IMDB

Résumé : Croyant quitté une vie basée sur la violence à la mort de son mari tueur de la mafia, la belle Angela doit bien vite déchanter car le grand patron la trouve très à son goût. Fuyant avec son fils, elle ignore qu'elle est surveillée par un agent du FBI...

 

Veuve, mais pas trop… est le dernier film, à ce jour, où Jonathan Demme laisse éclater sa verve et sa fantaisie. C’est le complément indispensable à son attachant Dangereuse sous tous rapports. Il narre les aventures d’Angela De Marco (Michelle Pfeiffer, éblouissante), qui cherche par tous les moyens à échapper à son milieu mafieux, sa « famille », à la suite de l’assassinat de son mari (Alec Baldwin), homme de main de Tony « Le Tigre » (Dean Stockwell, prodigieux), sorte de parrain local, pour essayer de redémarrer une nouvelle vie. Seulement le FBI, notamment un de ses agents, Mike (Matthew Modine, révélation du célèbre Full metal jacket de Kubrick), ne cesse de la traquer pour coincer Tony, d’autant plus qu’Angela est également pourchassée par celui-ci qui est tombée amoureux d’elle. Mais l’amour va entrer en jeu, compliquant encore plus la situation.

Demme réalise ici une de ses plus grandes comédies, qui derrière son air léger, cache une profonde humanité. Si l’humour se fait plus voyant que dans ses premières comédies douce-amères (Citizens band, Melvin and Howard, Swing shaft), le film reste néanmoins très acide. Il est notamment très critique envers les méthodes mafieuses et les méthodes policières, qu’il renvoie dos à dos. Une des scènes les plus fortes du film est la garde à vue d’Angela, durant laquelle les agents du FBI se comportent comme de véritables animaux, sans prendre en compte les sentiments d’autrui. Angela fera d’ailleurs remarquer la ressemblance flagrante de leurs méthodes avec celles de la mafia.

Demme suit malgré tout la voie de la comédie pure, enchaînant les quiproquos et le comique de situation avec un grand bonheur. Le personnage de Tony « Le Tigre », magistralement interprété par Dean Stockwell (Le garçon aux cheveux verts de Losey), est particulièrement drôle. Sous son allure de brute épaisse, sorte de parodie de parrain mafieux, tuant froidement ceux qui se dressent sur sa route, Tony est curieusement terrorisé par son épouse Connie (Mercedes Ruehl, excellente), savoureuse caricature de la « mama » italienne, d’une jalousie maladive. Leurs scènes comptent parmi les plus amusantes du film, Tony étant proprement terrifié, comme un enfant, par son ouragan de femme. Celle-ci est d’ailleurs la seule personne capable de lui faire peur (il suffit de prêter attention aux regards qu’ils se lancent mutuellement !), même s’il continue de faire la cour à Angela.

Cependant le cœur du film reste l’attachant personnage d’Angela. Celle-ci, comme la plupart des héros de Demme (notamment l’Audrey-Lulu de Dangereuse sous tous rapports), cherche désespérément à survivre, à se sortir du carcan dans lequel la mafia l’a enfermée. Mère d’un petit garçon auquel elle inculque des valeurs droites, elle suscite l’admiration par sa volonté d’avoir une vie normale, décente, dans laquelle elle pourra se regarder en face. Michelle Pfeiffer lui offre une dignité remarquable, rendant Angela très émouvante aux yeux du spectateur.

La scène où elle ramène Mike (Matthew Modine) dans son misérable appartement (il faut voir la baignoire située en plein milieu de la cuisine qui lui sert de table !), un peu émêchée par l’alcool qu’elle a ingurgité et où, après avoir maladroitement essayé de le séduire, elle lui confesse son manque d’intelligence et son désir désespéré d’avoir droit à une seconde chance, est extrêmement touchante, d’autant plus que le spectateur sait que Mike, agent du FBI, joue double jeu, rendant de ce fait la scène particulièrement cruelle.

Le spectateur en effet ne peut s’empêcher de compatir à la situation d’Angela. Demme a toujours dépeint des personnages qui, même s’ils ne sont pas bien malins, ont une profonde humanité. Il a toujours éprouvé un grand respect et une immense tendresse pour eux, pensant qu’ils méritent tous une seconde chance (voir Dangereuse sous tous rapports ou le méconnu mais magistral Melvin and Howard).

Comme l’affirme d’ailleurs le personnage de Modine : « Tout le monde a droit à une seconde chance ». La volonté d’Angela pour redémarrer une nouvelle vie et offrir une chance à son fils est poignante. Toutes les scènes qui la regardent déambuler dans les rues de la ville à la recherche d’un emploi simple mais qui lui redonnerait une certaine dignité sont très réussies, Demme n’ayant pas son pareil pour ancrer ses protagonistes dans le décor et les engluer dans une réalité qu’ils ne maîtrisent pas.

En revanche le personnage de Mike semble un peu plus fade, mais ne nuit nullement au film. Modine lui donne son air un peu lunaire, un peu décalé. Par ailleurs, les décors (meubles, bibelots, vêtements, décorations,… ) sont d’un mauvais goût réjouissant, les couleurs sont criardes, ringardes : il suffit de contempler l’extraordinaire maison des De Marco pour mesurer l’étendue du désastre. « Tout ce que nous avons est tombé d’un camion », déclare Angela. Ce mauvais goût culmine dans les ahurissantes chambres d’hôtel à Miami. Le rêve américain s’est transformé en un cauchemar hideux, complètement artificiel, clinquant et toc.

Veuve, mais pas trop… reste néanmoins une comédie, et Demme, qui aime trop ses personnages, ne peut s’empêcher d’offrir un nouveau départ à Angela et Mike, après leurs multiples déboires. Il ne faut surtout pas manquer le générique de fin, où le spectateur attentif pourra redécouvrir des scènes du film, cadrées d’un angle différent. La scène finale apparaît après la totalité du générique de fin et rend un vibrant hommage aux grandes comédies américaines classiques. On y découvre Angela et Mike entamer un gracieux pas de danse, avant de tomber dans les bras l’un de l’autre. Conclusion optimiste pour un film qui, sous son apparente légèreté, révèle le profond humanisme de son réalisateur.   

Publicité
Publicité
Commentaires
Déjantés du ciné
  • Site indépendant proposant plus de 700 critiques de films américains, asiatiques et européens, dans tous les genres (action, comédie, documentaire, drame, romance, fantastique et S-F, horreur, policier, politique, thriller, western, etc.)
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité