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Déjantés du ciné
14 mars 2008

Redacted de Brian de Palma

redacted

Film américain de 2007

Acteurs principaux : Kel O'Neill, Ty Jones, Daniel Sherman, Izzy Diaz, Rob Devaney, Patrick Carroll, Mike Fiqueroa, Paul O'Brien, François Caillaud, Eric Anderson,

Durée : 1h30

Résumé : A partir d'un fait divers, Brian de Palma s'interroge sur l'interventionnisme américain en Irak et sur la véracité des images.


FICHE IMDB



Réalisateur qui n'a eu de cesse tout au long de sa carrière de s'intéresser au sens et au pouvoir des images, Brian de Palma (Carrie, Pulsions, Outrages, Phantom of the paradise, Scarface, Blow out) nous revient avec un film particulièrement engagé et qui est loin d'être aimable. Tourné en 18 jours en Jordanie avec des caméras HD, le film a obtenu le Lion d'argent de la mise à la scène au dernier festival de Venise.

Redacted signifie rendre propre à la publication, autrement dit enlever les informations pouvant être gênantes. Le générique d'introduction du film est de ce point de vue extrêmement révélateur avec des informations qui sont indiquées au spectateur et qui sont progressivement effacées pour ne garder plus que le terme de Redacted.
Le film Redacted traite des conséquences de l'interventionnisme américain en Irak. Il nous montre le quotidien des militaires américains qui sont sur place pour aboutir au coeur de l'intrigue du film (inspiré d'un fait réel) à savoir le viol et le meurtre d'une jeune irakienne de 15 ans (le film se rapproche donc sur cet aspect des choses d'Outrages, où De Palma s'était intéressé au viol d'une jeune femme au Vietnam par les militaires et aux conséquences de cet acte).
Brian de Palma se sert de ce fait divers pour deux raisons : d'abord montrer que la réalité est très différente selon les sources utilisées ; ensuite dresser un tableau qui est loin d'être reluisant pour les militaires américains présents en Irak.
Le film de De Palma s'attache à montrer que la réalité est à géométrie variable. Elle dépend pour beaucoup des sources que l'on utilise. C'est pour cette raison que dans ce film qui prend des allures de faux documentaire, l'origine des images est très diverse : images vidéo des militaires américains, images vidéo des rebelles irakiens, caméras de surveillance, images envoyées sur Internet, images qui sont passées sur les journaux télévisés américains. Dès le départ, il faut dire que De Palma nous indique bien qu'il faut faire attention aux images qui sont véhiculées par les différents médias. Ainsi, il fait dire dès le début du film par le biais de l'un des militaires américains que la première victime en Irak sera la vérité.
Les militaires américains en prennent d'ailleurs pour leur grade dans ce film. On nous montre des militaires qui n'ont aucun respect pour la population locale (ils les appellent souvent les rats ou encore les bougnoules) et qui surtout se prennent pour les maîtres dans un pays qui n'est pourtant pas le leur. La justification de l'interventionnisme américain est posée à de nombreuses reprises. De Palma dresse un constat terrible de la situation actuelle. L'exemple le plus significatif est celui des barrages. Ceux-ci sont dressés pour tenter d'empêcher de passer les rebelles. On apprend dans le film que 2000 personnes ont trouvé la mort en voulant passer ces barrages et qu'au final seules 60 de ces personnes se sont révélées être des rebelles (un des points culminants de la bêtise de l'armée est le fait d'avoir tué les occupants d'une voiture alors que la femme à l'intérieur était sur le point d'accoucher et que les militaires avaient dit au conducteur de passer). A sa façon, Brian de Palma rend hommage au peuple irakien qui souffre et doit survivre dans un environnement particulièrement difficile ; l'empathie envers ce peuple étant accrue par l'utilisation de la Sarabande d'Haendel (que l'on retrouve comme un leitmotiv dans le magistral Barry Lyndon de Stanley Kubrick)

Les militaires présentés dans le film s'intéressent avant tout à leur propre personne : ils souhaitent soit devenir des héros qui seront très appréciés lorsqu'ils auront quitté l'Irak (on voit bien que la notion de héros est très relative, comme le prouve une des dernières scènes du film), soit tout simplement passer le temps agréablement (bières, jeux de cartes et, beaucoup plus grave, assouvir leurs pulsions sexuelles sur une pauvre jeune fille qui ne leur a rien fait). Pire : De Palma montre clairement dans le film que l'état-major américain a cherché coûte que coûte à classer sans suite les agissements de plusieurs militaires. D'ailleurs, ces militaires n'ont visiblement pour certains aucune conscience car ils cherchent encore à se trouver des excuses après avoir commis des gestes inadmissibles.

Faisant la lumière sur un acte abominable (le viol et le meurtre d'une jeune fille, sans compter le meurtre d'une partie de la famille de celle-ci au même moment) et sur les conséquences qu'il a engendré, Brian de Palma s'interroge dans Redacted sur le sens des images qui sont véhiculées lors de l'interventionnisme en Irak. Nullement aimable, le film de De Palma est un véritable brûlot contre la politique étrangère américaine actuelle : les dommages collatéraux, à savoir les civils irakiens blessés et morts lors du conflit sont d'ailleurs montrés à la fin du film par le biais d'images d'archives. Surtout, lors de cette dernière scène, Brian de Palma a l'intelligence de disséminer au milieu d'images « vraies » une pure image de fiction où l'on voit l'actrice qui joue la fille qui a été violée. C'est une façon pour De Palma de montrer que tout, en fin de compte, peut être changé. De Palma signale clairement que la vérité peut être facilement changée et que les images que l'on voit dans les journaux télévisés ne correspondent pas forcément à quelque chose de vrai. Le réalisateur américain fustige donc tout aussi bien l'interventionnisme américain en Irak que l'utilisation des images par les médias.

Au final, Redacted constitue un véritable électrochoc et un engagement de la part de De Palma contre les seules images qui sont véhiculées aux Etats-Unis par le Pentagone. Ce film marque clairement le retour au premier plan d'un réalisateur qui était à mon sens sur le déclin. Heureusement ce film me donne tort de ce point de vue.

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