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Déjantés du ciné
17 février 2013

Compliance de Craig Zobel

complianceTitre du film : Compliance

Réalisateur : Craig Zobel

Année : 2012

Origine : Etats-Unis

Durée : 1h30

Avec : Ann Dowd (Sandra), Dreama Walker (Becky), Pat Healy (l'agent Daniels), Bill Camp (Van), etc.

FICHE IMDB

Synopsis : La gérante d'un fast-food reçoit l'appel d'un homme qui déclare être un officier de police. Une de ses collègues aurait volé une cliente. C'est le début d'un engrenage infernal.

 

Mis en scène par Craig Zobel, Compliance (terme anglais qui signifie se plier à quelque chose) part d'un fait qui semble en apparence banal. La gérante d'un fast-food, Ann Dowd, une femme d'âge mur appliquée dans son travail, reçoit le coup de téléphone d'une personne qui se dit agent de police. Il déclare à Sandra que l'une de ses employés, aurait volé de l'argent à une cliente lorsqu'elle se trouvait à la caisse.

En recevant un tel coup de téléphone, Ann Dowd devrait vérifier deux éléments : est-ce que la personne qui lui téléphone est bien un agent de police ? Est-ce que les faits reprochés à sa collègue de travail sont bien établis ?

Comme aucune de ces questions n'ont fait l'objet de la moindre réflexion de Sandra, celle-ci va mettre la main dans un engrenage qui va se révéler destructeur.

L'action du film se déroule quasiment en huis-colos, dans le fast-food, avec la jeune Becky, accusée d'avoir volé dans le sac d'une cliente, qui est placée dans une pièce, isolée de ses collègues.

compliance2Non sans un certain talent, le réalisateur Craig Zobel parvient à faire monter progressivement la tension, jusqu'à mettre le spectateur dans une situation de malaise. Ce qui fait froid dans le dos dans cette affaire, c'est la gestion de l'événement par cette gérante de fast-food. Elle exécute à la lettre ce que lui demande son interlocuteur au téléphone (alors que celui-ci est de plus en plus intrusif et pervers dans ses souhaits), sans jamais réfléchir quant à la portée de ses actes. Au départ, Sandra questionne la jeune Becky, puis elle fouille dans son sac. Ensuite, elle franchit, sans s'en rendre compte, la ligne jaune : elle oblige ainsi Becky à se déshabiller pour voir si elle n'aurait pas sur elle l'argent volé. Ann ne tient compte à aucun moment des demandes et des protestations de Becky. Les humiliations sont de plus en plus importantes, jusqu'à aboutir à des sévices sexuels (fessée, obligation de montrer ses parties intimes, fellation). Le spectateur assiste impuissant à ces scènes et se demande bien comment Sandra ne pense jamais à se dire qu'elle va trop loin et qu'elle ne peut pas, normalement, faire pratiquer une fouille au corps par son compagnon.

De manière générale, le film amène le spectateur à s'interroger sur notre rapport à l'autorité. On voit qu'à plusieurs reprises Sandra choisit aveuglément d'écouter et de faire ce que lui demande le prétendu agent de police car il représente la loi. Le film fait peur car il signifie que face à un représentant de l'ordre, on peut accepter de se soumettre, sans jamais se poser la question de la légitimité des actes. Or, quoi que l'on fasse, on est toujours acteur et donc responsable de ce que l'on fait.

Par sa thématique, le film fait penser à l'expérience Milgram, du nom de ce psychologue américain, qui a travaillé sur la soumission à l'autorité.

Compliance est de son côté basé sur un fait divers puisque le pervers qui appelle a réellement sévi et réussi son coup dans un fast-food. Ce n'est donc pas seulement une fiction. Et même si certaines séquences peuvent paraître “too much”, elles sont là pour nous rappeler que face à des gens manquant cruellement de lucidité, tout peut arriver.

compliance3Tout ce qui nous est narré doit nous amener naturellement à poser un regard attentif sur ce que nous faisons. Dans une société postdémocratique, individualiste, où l'individu est sans cesse pressé (le fait que le film se déroule dans le milieu du fast-food est à cet égard quasiment une métaphore de notre monde actuel), il convient d'autant plus d'être vigilant par les choix que l'on effectue. Dans le film, la bêtise et le manque de clairvoyance de Sandra l'ont conduit à prendre des décisions pour le moins répréhensibles. Le plus hallucinant dans tout ça, c'est qu'au bout du compte, elle ne comprend toujours pas qu'elle est responsable des dégâts qu'elle a causés. Il y a de quoi d'être inquiet.

Compliance ne serait évidemment pas aussi réussi sans un jeu d'acteurs convaincant. Ann Dowd est très bien dans le rôle de cette femme pas très futée qui va rapidement être dépassée et gérer les événements de manière catastrophique. Pour lui rendre la pareille, Dreama Walker apparaît comme une victime crédible, qui subit tout ce qui lui arrive, sans jamais réussir à offrir une résistance lui permettant d'arrêter le cours des choses. Ses attermoiements et ses regards tristes en disent long sur le calvaire vécu par son personnage.

En conclusion, Compliance est un très bon thriller psychologique qui étouffe progressivement le spectateur, tant en raison de sa tension qui augmente progressivement que de son déroulement dans un lieu clos où l'on sent qu'il n'y a aucun échappatoire. Certaines scènes, assez dures à encaisser, réservent tout de même le film à un public averti. De son côté, le cinéaste Craig Zobel est un cinéaste à suivre.

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