Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Déjantés du ciné
30 juillet 2020

Mystery men de Kinka Usher

2264_K230_5Titre du film : Mystery men

Réalisateur : Kinka Usher

Année : 1999

Origine : États-Unis

Durée : 2h01

Avec : Ben Stiller, Greg Kinnear, William H. Macy, Geoffrey Rush, Hank Azaria, etc.

FICHE IMDB

Synopsis : Mr Furious, Blue Raja et Shoveler sont des héros dotés de pouvoirs très limités. L’un a une force décuplée uniquement quand il est très en colère, l’autre lance des fourchettes et des cuillères, et le dernier manie remarquablement sa pelle de mineur. Ils sont constamment éclipsés par le puissant et cabotin Captain Amazing, protecteur de Champion City.

 

En 1989, Tim Burton avait frappé un grand coup avec sa version sombre et gothique de Batman. Mais la saga de la plus célèbre chauve-souris va tomber de Charybde en Scylla avec les horribles épisodes de Joel Schumacher. Le cinéaste de Génération perdue signe deux nanars absolus avec Batman forever (1995) et Batman et Robin (1997). Dans ces films, Gotham city est devenue une ville ultra colorée. Quant aux méchants, ils sont plus clownesques que réellement inquiétants.

2264_06694C’est dans ce contexte que Kinka Usher, venant du monde de la publicité, a l’idée de mettre en scène Mystery Men. Comme les films de super-héros sont à cette époque devenus du grand n’importe quoi, alors pourquoi ne pas y aller franchement en jouant la carte de la parodie. L’outrance du propos et le côté complètement déjanté du film n’ont pas plu à l’époque. Mystery Men a été un échec retentissant. Nanti d’un budget très confortable de 68 millions de dollars, il n’en a rapporté que la moitié dans le monde entier. Et c’est d’ailleurs à ce jour l’unique film de Kinka Usher qui sera puni à vie pour cet outrage aux caisses hollywoodiennes. En France, l’accident industriel ne durera que deux semaines avec un score dérisoire de 17 000 spectateurs ; il faut dire que ce Mystery Men, sorti à l’aube de l’an 2000, était mal servi par une affiche peu aguichante.

Cependant, plus de vingt ans après sa sortie, le regard sur
Mystery Men a changé. Il obtient même aux yeux de certains le statut de film culte. Il faut dire que Mystery Men a été un précurseur pour des œuvres telles que Kick-Ass (2010) et Super (2011) de James Gunn. Et cet OFNI (objet filmique non identifié) est un long métrage à part. Bien différent et nettement plus original que l’univers Marvel. En ces temps d’uniformisation de la culture, les films de super-héros n’échappent pas à la règle avec les sagas interminables des X-Men, Avengers et consorts. Et on a droit toujours aux mêmes formules : des scénarios prévisibles et des effets spéciaux rutilants.

2264_08660Avec Mystery Men, on sort clairement des sentiers battus. En effet, le film est à la fois une excellente parodie de films de super-héros et une critique acerbe de la société contemporaine. Malgré ses vingt années au compteur, il n’a pas pris une ride sur ces deux plans.
L’action prend place à Champion City avec un super-héros, Capitaine Admirable (excellent Greg Kinnear) censé débarrasser la ville des méchants. A la tête de ceux-ci, le méchant de service est joué par un Geoffrey Rush en roue libre. Il faut dire qu’il interprète le rôle de Casanova Frankenstein. Tout un programme. Bien loin des standards des méchants habituels, Casanova Frankenstein est un quasi-dandy aimant faire la fête. L’aspect parodique envers l’univers de Batman est évident.

Mais le pastiche ne s’arrête pas. Nos Mystery Men sont de drôles de personnages. En effet, ils sont tous convaincus d’avoir des pouvoirs particuliers alors que ceux-ci s’avèrent pour le moins réduits. Ben Stiller alias « Furieux » tirerait sa force des moments où il est en colère. Quant à William H. Macy, il est la « Pelle » car il utilise avec beaucoup de dextérité cet outil pour terrasser ses adversaires. Et que dire de « Spleen » capable d’envoyer sur demande des pets malodorants ! Mais le personnage le plus étonnant sur ce point est l’homme invisible. Comme il le dit à ses camarades lors de son recrutement : « je peux seulement devenir invisible lorsque personne ne me regarde » ! On rigole bien en voyant ces losers décidés coûte que coûte à éradiquer le Mal de Champion City. A cet égard, la phase de recrutement de nouveaux « super-héros » donne lieu à une séquence bien tordante.

2264_05047Cela étant, la force des Mystery Men ne réside pas uniquement dans son aspect humoristique. Le film décrit avec beaucoup d’acuité le quotidien de personnages on ne peut plus ordinaires. On entre de plain-pied dans leur vie privée. « La Pelle » est un ouvrier dont la femme, lassée par son délire de super-héros, compte le quitter. De son côté, « le fakir bleu » (Hank Azaria) vit toujours chez sa mère alors qu’il a déjà un certain âge. Et « Furieux » (Ben Stiller) veut la jouer gros dur alors qu’il ne sait pas comment aborder la femme qui lui plaît. Le réalisateur Kinka Usher s’intéresse à des gens ordinaires rêvant d’une vie extraordinaire. Il se dégage une vraie émotion dans cette histoire avec ces héros plus proches que jamais de nous. Donc il y a ici un supplément d’âme qui manque (bien souvent) aux « vrais » films de super-héros.

Ce long métrage pose par ailleurs la question de la notion de héros. Qu’est-ce qu’un héros ? C’est une personne ayant un comportement héroïque. Ainsi, le courage, la fraternité et la résilience font de « Furieux » et consorts des héros. Ils ont conscience de leur cas mais croient en eux : « Nous ne sommes pas de classiques super-héros. Nous ne sommes pas les favoris. Nous sommes les autres gars. Ceux sur qui on ne parie jamais. » (« la Pelle »).

Enfin, même si c’est moins évident,
Mystery Men est un formidable plaidoyer anticapitaliste. Le fameux Capitaine Admirable, super-héros de pacotille, cristallise à lui seul cette idée. Tout se monnaye chez lui : il a de nombreux sponsors (figurant sur son costume), fait constamment appel à la presse et est invité partout dans les médias. On peut voir en lui le symbole du capitalisme dominant. Le film établit donc une césure entre ce super-héros riche et nos protagonistes issus de classes populaires. Cela n’est pas anodin si nos losers triomphent des embûches figurant sur leur passage.
Derrière le vernis de parodie délirante,
Mystery Men laisse apparaître un film (parfois) subtil aux thématiques universelles. Ce long métrage mérite clairement d’être réhabilité.

Critique parue à l’origine sur le site Ciné Dweller à l’adresse suivante :
https://cinedweller.com/movie/mystery-men-la-critique-du-film-et-le-test-blu-ray/

Publicité
Publicité
Commentaires
Déjantés du ciné
  • Site indépendant proposant plus de 700 critiques de films américains, asiatiques et européens, dans tous les genres (action, comédie, documentaire, drame, romance, fantastique et S-F, horreur, policier, politique, thriller, western, etc.)
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité