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Déjantés du ciné
8 novembre 2015

Présumé coupable de Vincent Garenq

presumecoupable1Titre du film : Présumé coupable

Réalisateur : Vincent Garenq

Année : 2011

Origine : France

Durée : 1h41

Avec : Philippe Torreton, Wladimir Yordanoff, Noémie Lvovsky, Raphael Ferret,

FICHE IMDB

Synopsis : Le film raconte le calvaire d'Alain Marécaux - "l'huissier" de l'affaire d'Outreau - arrêté en 2001 ainsi que sa femme et 12 autres personnes accusés de pédophilie. C'est l'histoire de la descente en enfer d'un homme innocent face à un système judiciaire incroyablement injuste et inhumain, l'histoire de sa vie et de celle de ses proches broyée par une des plus importantes erreurs judiciaires de notre époque.

 

Avec Présumé coupable, sorti au cinéma en 2011, le réalisateur français Vincent Garenq revient sur l'une des pages judiciaires les plus sombres de l'histoire française, l'affaire Outreau. Il est rare qu'un cinéaste français revienne aussi vite sur une affaire sensible, qui a secoué à l'époque la France entière puisqu'il s'agissait d'une affaire de pédophilie où certains des accusés ont été injustement condamnés.

Le film est une adaptation fidèle du livre Chronique mon erreur judiciaire (2005, éditions Flammarion), écrit par Alain Marécaux, l'une des victimes du procès Outreau. Ce dernier a d'ailleurs beaucoup participé à cette adaptation au cinéma.

D'emblée, le film Présumé coupable frappe par son réalisme. Si l'on n'était pas dans une fiction, on pourrait même penser qu'il s'agit d'un documentaire, tant les faits paraissent réalistes. Sur un rythme alerte, on suit directement le calvaire d'Alain Marécaux, forcé en pleine nuit en novembre 2001, de quitter son domicile pour être placé en garde à vue. Le motif ? Il aurait abusé sexuellement d'enfants mineurs. Sauf que les gens qui l'accusent ne le connaissent même pas...

A la manière d'un Sidney Lumet qui a dénoncé à moults reprises les failles du système judiciaire américain, le cinéaste Vincent Garenq montre que lorsque la machine judiciaire est lancée, plus rien ne peut l'arrêter. Même lorsqu'elle fait fausse route. De manière très claire, Vincent Garenq pointe le doigt sur un système judiciaire omnipotent, bancal et donc dangereux.

presumecoupable3Evidemment, dans cette histoire tragique, Présumé coupable évoque la personnalité de Fabrice Burgaud, juge d'instruction au TGI de Boulogne sur Mer, qui s'est trompé sur toute la ligne en incarcéré pendant plusieurs années des innocents. Il lui est reproché un procès à charge (d'où le titre du film) alors que la règle est en principe la présomption d'innocence. Avec un procès à charge, on baffoue l'un des fondamentaux de notre justice, à savoir le principe du contradictoire, et de cette présomption d'innocence.La méthode employée par ce juge peut laisser dubitatif. Fabrice Burgaud s'est contenté d'allégations délirantes d'une femme peu fiable (Myriam Badaoui et consorts) et d'enfants affabulateurs. Et il a visiblement fait preuve d'une inhumanité tout à fait révoltante pour mener son affaire.

L'enseignement de cette histoire révoltante est qu'il demeure dangereux de donner des pouvoirs aussi importants à une seule personne. Ce juge – qu'il s'agisse de Burgaud ou de toute autre personne – demeure un être humain qui peut donc à tout moment se tromper. Pour des affaires importantes, qui mettent en cause la liberté des gens, il serait judicieux qu'il n'y ait pas qu'un seul juge et que les contrôles soient pertinents. En l'état, on a vraiment la désagréable impression que les différentes instances judiciaires se sont contentées de donner raison à l'échelon inférieur.

Présumé coupable n'est pas seulement un film fort intéressant sur le dysfonctionnement de notre système judiciaire. Il se révèle très prenant en raison de l'extraordinaire interprétation d'Alain Marécaux par un Philippe Torreton qui fait corps avec son personnage. L'acteur a d'ailleurs perdu beaucoup de poids pour se muer dans le rôle. On assiste avec effroi au calvaire d'Alain Marécaux dont l'état de santé ne cesse de s'aggraver. Si les deux films sont fort différents, la descente aux enfers d'Alain Marécaux n'est pas sans rappeler celle du film Hunger.

presumecoupable4Les conséquences de cette affaire : deux personnes décédées (la mère d'Alain Marécaux ainsi que l'un des “présumés coupables” qui s'est suicidé) et des vies brisées. Difficile de se reconstruire quand on a subi de telles outrages, dans une affaire hyper-médiatisée.

A la fin de Présumé coupable, on a la sentation d'avoir assisté à un film fort, qui rappelle avec beaucoup d'acuité ce qui constitue l'une des affaires les plus scandaleuses de l'histoire judiciaire française.

Ce film, qui prend vraiment à la gorge, donne vraiment envie de souhaiter le meilleur à toutes ces personnes injustement condamnées. Pour la “petite” histoire, Alain Marécaux a mis un point d'honneur à redevenir huissier de justice en 2007.

Quant à Fabrice Burgaud, la gestion catastrophique de l'affaire Outreau, les vies qu'il a brisées indirectement sans évoquer à aucun moment le moindre pardon ou remords, lui a valu du Conseil supérieur de la magistrature une “réprimande avec inscription au dossier” le 24 avril 2009. Et ce magistrat poursuit tranquillement sa carrière. Le 1er septembre 2011, il a été nommé magistrat du premier grade à la Cour de cassation. Vous avez dit choquant ?

En tout cas, même si Présumé coupable présente uniquement la version des faits d'Alain Marécaux dans cette affaire Outreau, c'est un film intense et prenant qui mérite clairement d'être regardé.

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Alain Marécaux et Philippe Torreton

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