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Déjantés du ciné
26 février 2008

Rollerball (2002) de John Mac Tiernan

Rollerball__2002_ Réalisé par John Mac Tiernan
Titre original : Rollerball
Année : 2002
Origine : Etats-Unis
Durée : 98 minutes
Avec : Chris Klein, Jean Reno, LL Cool J, Rebecca Romijn, Naveen Andrews, Oleg Taktarov, David Hemblen,...

Fiche IMDB

Résumé : Le rollerball, sport d’équipe très violent où tous les coups sont permis, enflamme les foules et bénéficie d’une diffusion sur les chaînes du monde entier. Dépourvu de scrupules, l’entraîneur mafieux Alexis Petrovich n’hésite pas à truquer les compétitions à l’insu de ses joueurs. En particulier, lors d’une tournée de son équipe en Asie centrale…


Ce texte, qui défend un film particulièrement controversé du grand cinéaste américain John Mac Tiernan, contient des spoilers : il est donc conseillé d'en entreprendre la lecture après avoir vu le film.

Après son excellent remake de L’affaire Thomas Crown (intitulé en français Thomas Crown), film à mon sens surestimé de Norman Jewison, John Mac Tiernan se lance dans un nouveau remake d’un autre film célèbre de Jewison, Rollerball (1975). Après les échecs publics successifs des pourtant intéressants Le 13ème guerrier et Thomas Crown, Mac Tiernan se réapproprie Rollerball en en faisant un film d’une grande sauvagerie.

Rollerball devient entre ses mains un film d’une noirceur absolue, où Mac Tiernan a transposé l’action du film original dans les pays d’Asie Centrale comme la Mongolie et notamment ceux nés après l’éclatement de l’URSS (Kazakhstan, Turkménistan,...). Si le film reprend à peu de choses près la trame principale du Rollerball de Jewison, le traitement de Mac Tiernan est très différent.

Le spectateur suit donc les aventures d’un jeune casse-cou, Jonathan Cross (Chris Klein) qui accepte de participer, afin de se renflouer, en compagnie de son ami Marcus Ridley (le rappeur LL Cool J) à un sport extrême, le rollerball, où tous les coups son permis, dans un tournoi organisé dans les pays d’Asie Centrale par le tyran Alexandre Petrovich (Jean Réno, assez jouissif). Mais les règles semblent truquées… 

La vision du film frappe par sa saleté perpétuelle : toutes les rues où se déroule le film sont décrépites, surpeuplées de clochards, de maisons à moitié détruites, de détritus, d’ordures. La pauvreté est omniprésente. Mac Tiernan montre également des pays où les gens semblent enfermés, prisonniers. Comme le fait remarquer Aurora (la belle Rebecca Romijn, l’héroïne d'un film récent de De Palma, l’excellent Femme fatale), « il est impossible de quitter le pays ».

D’ailleurs, la fameuse scène de poursuite dans la nuit filmée en infrarouge, pourtant tant décriée, ne dit pas autre chose que cela : sortir n’est qu’un trompe-l’œil dans un monde où toute tentative d’évasion se heurte à une limite qu’on ne peut faire que reculer, mais jamais dépasser. Comme le constate à juste titre Mac Tiernan lui-même, les spectateurs qui critiquent l’audace de cette séquence sont les premiers à regarder les reportages des informations télévisées filmés de la même manière, en vision de nuit.

Cela dit, Rollerball est un film véritablement rageur, où Mac Tiernan pointe du doigt tous les travers de la société actuelle, notamment la course à l’audimat, la dictature de la publicité et l’omniprésence des médias. Il suffit de penser à la première scène de rollerball proprement dite du film, où Jonathan Cross doit montrer à l’écran la marque de la boisson qu’il est en train d’engloutir. Mac Tiernan dépeint une société où seule la consommation compte, où le capitalisme règne en maître et où les gens sont réduits à n’être que des consommateurs.

Toutes les scènes de rollerball frappent par leur violence, elles sont filmées frontalement, sans concession. On cogne, on frappe, on roule, les corps des joueurs tombent, virevoltent, s’écrasent contre une paroi qu’ils ne peuvent franchir. Mac Tiernan entrecroise ces séquences avec des scènes dans lesquelles il observe les examinateurs compter les billets, prendre les paris. Tous les moyens sont bons pour faire grimper le taux d’audience, même s’il faut tromper spectateurs et téléspectateurs. Mac Tiernan semble nous dire que tout est leurre, qu’il n’existe plus que la manipulation, l’essentiel étant que le peuple ne se rende compte de rien. Jean Réno compose un personnage tyrannique, représentant le capitalisme sauvage, intriguant et manipulant dans tous les sens. Seul compte pour lui la diffusion du rollerball dans le monde entier.

Devant ce tyran, les gens ne peuvent que s’écraser ou se taire. Le rollerball devient l’opium du peuple, surtout des plus défavorisés (les mineurs du film). Mais les émeutes commencent à se multiplier, les rues grondent, la révolution se fait sentir. Lors du match d’adieu organisé pour le départ de Jonathan, en fait pour son meurtre censé faire sauter l’audimat, quelque chose casse. Mac Tiernan filme cette scène de manière encore plus brutale. Les corps tombent en maculant le terrain de sang, tout y devient plus exacerbé, plus aucune règle ne protège le jeu. Les dirigeants scrutent avec délectation le spectacle, le taux d’audience explose : les spectateurs veulent de la violence, on va leur en donner jusqu’à plus soif. La vitre séparant le terrain de la tribune des officiels devient alors la seule frontière à franchir. Dans un accès de fureur, Jonathan brise enfin cette vitre : la frontière tombe et la révolution peut se mettre en marche. La suite du film est une escalade dans la barbarie : le peuple finit par se soulever pour lutter contre la dictature, contre le fait qu’on en a fait des drogués de l’image.

Une question peut cependant se soulever : pourquoi Jonathan, héros individualiste, a-t-il provoqué cette révolte ?  Réponse : Mac Tiernan est finalement un grand romantique, d’ailleurs comment en douter à la vision de ses films, qui sont en fait surtout des films d’amour (Thomas Crown étant sans doute son film d’amour le plus direct) ! En effet, Jonathan a déclenché une révolution par amour pour Aurora, menacée et victime du chantage odieux de Petrovich. Superbe geste romantique, qui donne une signification nouvelle au film : ce brûlot nihiliste, plein de bruit et de fureur, est tout simplement un magnifique film d’amour, un amour qui s’affranchit de toutes les frontières, qui finit par briser les murs et déclencher une révolution !

Rollerball est un film inachevé, que Mac Tiernan n’a pu mener à terme (selon lui, le film tel qu’il est sorti ne représenterait que le tiers du film qu’il avait en tête). Mais, tel qu’il est aujourd’hui, il reste d’une noirceur et d’une fureur implacables. Si le film peut certes dérouter (ce fut un échec public total), il n’en demeure pas moins l’un des plus intéressants et audacieux de son auteur, qui y a pris d’énormes risques.       

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Commentaires
T
J'ai de sérieuses réserves sur ce film :<br /> -> casting épouvantable de Chris KLEIN à LL COOL J (rapper année 80-90) en passant par Jean Réno qui cabotine comme jamais dans un role de méchant russe.<br /> -> BO épouvantable genre métal pour faire djeuns (public MTV), excepté le thème final de la révolte des "esclaves" ou Serra retrouve de l'inspiration, on frole le néant.<br /> -> Certaines scènes rendent vraiment rien, les scènes de sport sont vraiment mal foutues avec un abus des gros plan. On est souvent à la limite du clipesque. Et le directeur de la photographie est à VIRER !!!<br /> <br /> Au final, c'est un film raté qui vaut au maximum 4-5 / 10 <br /> Cependant, ce film ne mérite pas tant de haines (voir ce humiliant 2,7/10 sur IMDB, note que je mets pour des chefs d'oeuvre du bis comme Dracula's dog) surtout quand on voit les daubes fabriquées à la chaine par Hollywood (fast & furious...).<br /> <br /> Sur IMDB j'ai vu que TIERNAN a 3 films en projet. C'est une bonne nouvelle quand on sait tous les pbs judiciaires que le bougre a.
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