Bad lieutenant : escale à la Nouvelle-Orléans de Werner Herzog
Année : 2010
Origine : Etats-Unis
Durée : 122 minutes
Avec : Nicolas Cage (Terence Mc Donagh), Eva Mendes (Frankie), Val Kilmer (Stevie Pruit), Xzibit (Big fate), etc.
Résumé : Un inspecteur de police intègre sombre progressivement du côté obscur.
Dernier film en date de Werner Herzog, Bad lieutenant : escale à la
Nouvelle-Orléans est à la base un remake de l'excellent film d'Abel
Ferrara (1992).
Sauf que si le Bad lieutenant new look n'est pas un mauvais film en tant
que tel, malheureusement il ne tient pas du tout la comparaison avec le
long métrage d'Abel Ferrara. Et ce pour au moins 3 raisons :
- on ne retrouve pas l'ambiance poisseuse de l'oeuvre originale ;
- le flic incarné par Harvey Keitel demeure irremplaçable ;
- le scénario n'est plus aussi élaboré et surtout le questionnement de
Ferrara, avec cette histoire de rédemption, n'est plus du tout présent.
On regrettera fortement le côté un peu branchouille du film avec
finalement une absence quasi totale de morale. Ferrara rachetait son
personnage à la fin, ce qui n'est pas du tout le cas d'Herzog.
Pour autant, Bad lieutenant : escale à la nouvelle-Orléans est loin
d'être un mauvais film. Si Nicolas Cage ne pourra pas remplacer
l'interprétation hallucinante d'Harvey Keitel dans l'oeuvre originale,
il n'empêche que la grande qualité du film actuel est bien le jeu
d'acteur de Nicolas Cage. Ce dernier, qui est assez inégal au vu de ses
interprétations parfois bien mauvaises, est tout de même plutôt bon dans
ce film. Alors que l'on apprend dans le film que Terence Mc Donagh (le
personnage de Cage) s'est blessé au dos en sauvant un homme, cela donne
l'occasion à Nicolas Cage à déplacer sa grande carcasse avec un air de
mec paumé et cinglé.
On assiste quasiment à l'inverse du Bad lieutenant original. Ici le
personnage principal était assez sérieux au départ mais est devenu un
vrai ripoux. Si tout cela n'est pas bien fait, cela permet au moins au
cinéaste Werner Herzog à multiplier les séquences où son personnage
apparaît vraiment comme un salaud. De ce point de vue, les scènes que
l'on pourrait citer sont nombreuses. On retiendra notamment le moment où
Terence Mc Donagh se fait une fille dans une ruelle sombre avec le
copain de celle-ci juste à côté ; le moment où il utilise des méthodes
peu conventionnelles pour obtenir des informations d'une vieille dame
qui manque d'oxygène ; le moment où pour sauver sa peau et celle de sa
copine il décide de traiter avec des dealers ; le moment où il fait une
pression mentale auprès d'un joueur de football américain connu afin que
ce dernier truque son prochain match.
Le film de Werner Herzog, qui multiplie ce genre de scènes, peut
paraître un peu « too much » mais cela passe quand même pas mal, en
raison principalement de la bonne interprétation de Nicolas Cage. Revers
de la médaille : il y en a tellement pour Nicolas Cage que du coup tous
les autres acteurs, à commencer par Eva Mendes qui joue le rôle de sa
copine dans le film, paraissent un peu insipides.
Par ailleurs, Werner Herzog tend à nous dépeindre une société américaine
aux abois alors qu'il est loin d'être évident que cette société est
perdue de toutes parts. On a droit à un flic ripoux, sans aucune
conscience morale. Sa copine est une prostituée ; l'amie de son père est
une alcoolique et il traite avec des dealers, lesquels sont présents un
peu partout. Sans compter que Terence Mc Donagh n'arrête pas de se
droguer, en plus de prendre des médicaments. Une scène mérite cependant
d'être soulignée : le moment où Terence Mc Donagh assiste au meurtre du
personnage à qui il devait de l'argent. Sous l'effet de l'héroïne, il
voit ce personnage mort en train de danser. Puis il voit un caméléon.
Malgré son côté violent et satirique évident, Bad lieutenant new look
demeure un film dispensable car jamais ou en tout cas rarement il ne
dépasse le stade de la série B. Et puis il faut bien reconnaître que
Werner Herzog a concocté un film qui est discutable sur le plan de la
morale. A aucun moment son anti-héros ne se pose la question du mal
quant aux actions qu'il conduit. Là encore, on est loin de l'oeuvre
originale. Le film confirme son aspect branchouille en oubliant au
passage la notion de morale.
Et puis terminons en signalons que l'oeuvre originale était tout de même
bien plus prenante avec cette histoire de nonne violée. Alors
qu'aujourd'hui le film d'Herzog se contente de rentrer dans le milieu
des dealers, comme on a pu le voir mille fois déjà au cinéma.
En synthèse, Bad lieutenant : escale à la Nouvelle-Orléans demeure une
série B sympathique, qui comporte plusieurs scènes efficaces mais il n'y
a pas vraiment la réflexion et la tension que l'on retrouverait dans le
film d'Abel Ferrara.