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Déjantés du ciné
6 août 2011

La conquête de Xavier Durringer

laconquete1Titre du film : La conquête

Réalisateur : Xavier Durringer

Année : 2011

Origine : France

Durée du film : 105 minutes

Avec : Denis Podalydès (Nicolas Sarkozy), Florence Pernel (Cécilia Sarkozy), Bernard Le Coq (Jacques Chirac), Samuel Labarthe (Dominique de Villepin), Saida Jawad (Rachida Dati), Hippolyte Girardot (Claude Guéant), Grégory Fitoussi (Laurent Solly), Dominique Besnehard (Pierre Charon), Michel Bompoil (Henri Guaino), etc.

FICHE IMDB

Résumé : 6 mai 2007 : alors qu'il s'apprête à devenir le nouveau président de la République française, Nicolas Sarkozy se remémore les cinq années qui viennent de s'écouler.

 

En 2006, l'humoriste Karl Zéro avait réalisé avec Michel Royer le film Dans la peau de Jacques Chirac, un faux documentaire présentant à sa façon la vie de Jacques Chirac par le biais d'images d'archives et de la voix de Didier Gustin qui imitait alors la voix du président français. Si ce film était tout à la fois drôle et intéressant par sa façon de montrer que les politiques sont prêts à tout pour obtenir le pouvoir, on pouvait tout de même regretter le manque d'enjeux. En effet, en 2006, Jacques Chirac terminait son deuxième mandat et on se doutait bien qu'il ne se présenterait pas pour un troisième mandat de président.

En 2011, le cinéaste Xavier Durringer s'intéresse lui aussi à un homme politique, précisément celui qui a succédé à Jaques Chirac : Nicolas Sarkozy. On appréciera que cette fois le film se déroule pendant le mandat de l'homme politique qui est étudié. En effet, ce film se situe à un an de la fin du mandat de Nicolas Sarkozy et il peut donc avoir des répercussions sur la suite des événements. Le film est donc particulièrement d'actualité.

Sa réussite principale tient sans aucun doute à sa description (peu enviable) des hommes politiques. Nicolas Sarkozy apparaît ainsi dans le film comme un homme prêt à tout pour obtenir le pouvoir. C'est ainsi que cet homme, qui ne pense pas aux élections présidentielles de 2007 uniquement en se rasant, choisit de faire parler de lui à chaque instant, qu'il soit à Bercy ou au Ministère de l'Intérieur. Le but est de focaliser l'attention sur lui pour que les médias parlent de son action. Le film indique également que l'on ne gagne pas une élection présidentielle sans certaines lignes directrices.

Il est nécessaire de faire passer des idées simples. C'est ainsi que le film rappelle à un moment donné le fameux « Travailler plus pour gagner plus. » Dans le même temps, Nicolas Sarkozy s'évertue, avec énergie, à ringardiser les autres hommes politiques. Cela va même jusqu'à se moquer d'eux de façon assez méchante. Ainsi, concernant Ségolène Royal, son adversaire du second tour des présidentielles 2007, il y a cette phrase mesquine, même si elle est non dénuée d'un humour certain : « Elle ne dit rien sur rien, mais avec le sourire ! »

Cette volonté de pouvoir n'est pas sans conséquences. Le film montre bien que la vie privée de Nicolas Sarkozy en est une des victimes directes. Cécilia Sarkozy est présentée comme une femme usée, qui ne supporte plus que sa vie privée soit étalée au grand jour et c'est donc tout naturellement qu'elle s'écarte progressivement de ce système. On voit bien qu'après une première rupture, elle est obligée de revenir provisoirement (très belle scène où Cécilia Sarkozy quitte tendrement l'homme qu'elle aime pour rejoindre très froidement un Nicolas Sarkozy qui l'attend de pied ferme) afin de sauver les apparences. Car on ne peut pas être élu président de la République en tant que célibataire. Il est nécessaire de faire passer cette belle image d'Epinal de la famille heureuse qui est réunie pour le meilleur et pour le pire. Au final Nicolas Sarkozy semble bien seul sur le plan privé.

Les autres personnages présentés dans le film ne sont pas mieux que lui. Ils sont même quasiment pires. Avec ses bonnes manières apparentes, Dominique de Villepin n'est pas non plus vraiment à son avantage dans ce film. Il nous est indiqué qu'il fait tout pour faire couler Sarkozy, avec en point d'orgue l'affaire Clearstream. Plus sournois que le Sarkozy qui nous est présenté dans le film, il enrage de voir son adversaire, qu'il affuble de quolibets (le « gesticulateur précoce » ; un homme « maniaco-dépressif ») progresser dans les sondages, et il se permet même une réflexion d'une certaine bassesse lorsque ce dernier est élu président : « ce nabot va mettre le pays au même niveau que sa taille. » Cela étant, Sarkozy n'est pas dupe et lui renvoie plusieurs fois la pareille. Lors de leur célèbre rendez-vous à la Baule où Dominique de Villepin n'avait pas hésité à faire venir les journalistes pour montrer sa belle plastique, on prête dans le film ce discours à Nicolas Sarkozy : « Ce que vous étiez beau Dominique ! On aurait dit Ursula Andress dans James Bond contre Docteur No ! »

Quant à Jacques Chirac, on sent à chaque instant qu'il souhaite mettre des bâtons dans les roues de Sarkozy, pour l'empêcher de réaliser son rêve présidentiel. C'est manifestement dû au fait que Chirac n'a pas admis que Sarkozy l'ait trahi au bénéfice de Balladur avant de se raviser.

Le constat sur notre monde politique qui est fait de bassesses, de trahisons en tous genres n'est pas un scoop, mais ramené à une fiction qui évoque la vie quotidienne, cela donne une certaine idée des personnages. Et puis rien de tel que d'utiliser le ton de l'humour pour faire passer un message. De ce point de vue, le film marque incontestablement des points.

Par ailleurs, un mérite certain du film est d'étayer le fait qu'on ne remporte pas une élection présidentielle tout seul. On a besoin d'être entouré de gens qui travaillent constamment à vos côtés, et qui sont parfaitement sur la même longueur d'ondes. C'est ainsi que le film présente toute l'équipe qui est dévouée à Sarkozy, de Laurent Solly à Claude Guéant en passant par Pierre Charon, Henri Guaino et Rachida Dati. Tous traquent l'actualité pour Sarkozy, participent à une certaine censure de la presse, écrivent les discours de leur chef et lui indiquent quels sont les plans à prévoir.

Pour avoir réussi un film plutôt satisfaisant dans l'ensemble – qui donne une image peu flatteuse des politiciens – Xavier Durringer peut remercier sa distribution, qui est de grande qualité. Au premier rang, on ne peut que souligner l'impressionnante prestation de Denis Podalydès qui incarne à merveille Sarkozy. Tant dans son timbre de voix que dans son attitude, il fait penser à Sarkozy. Florence Pernel est également parfaite dans le rôle de Cécilia Sarkozy, une femme qui est la seule à tenir tête à son époux et qui n'en peut plus de cette vie. Samuel Labarthe est aussi excellent en interprétant un Dominique de Villepin obsédé à l'idée de détruire l’inexorable ascension de Sarkozy. Le reste de la distribution est également de très bon niveau.

Cela étant dit, La conquête n'est pas dénué de défauts. D'abord, il faut bien reconnaître que sur le fond, on n'apprend pas grand chose. Tout ce qui se déroule sous nos yeux n'est que le rappel fictionnel d'événements qui ont fait les gros titres dans les médias. Sans son excellente distribution, Xavier Durringer aurait vu son film sévèrement amoindri, et peut-être réduit au rôle de la simple farce politique.

Ce manque de surprise se révèle d'ailleurs au niveau de la mise en scène. Mis à part cet élément scénaristique où Sarkozy, à quelques heures de son élection, se rappelle du passé (à partir de 2002), ce qui donne lieu à plusieurs scènes de flashbacks, il n'y a pas grand chose de remarquable. La mise en scène est très classique et se limite à des champs – contre champs. Le film se démarque d'un téléfilm parce qu'il a bénéficié de moyens relativement importants, qui se traduisent par un nombre important de figurants et par des scènes des spectacles qui rappellent les élections hautes en couleurs que l'on voit aux Etats-Unis.

Au final, La conquête est tout à la fois une comédie sur le pouvoir, une sorte de thriller politique et une histoire d'amour contrariée (la relation entre Cécilia et Nicolas Sarkozy). Le film vaut surtout par sa description des hommes politiques contemporains, qui parlent de l'intérêt général devant les caméras mais ne recherchent bien souvent que leur intérêt personnel.

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