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Déjantés du ciné
26 avril 2012

Compte rendu du festival Hallucinations collectives (Lyon, avril 2012)

Deuxième édition du festival Hallucinations collectives à Lyon :

HalluaffichePour Pâques, quand on est petit, on part dans le jardin chercher les œufs.

Pour Pâques, quand on devient grand, il faut aller à Lyon. Pourquoi ? Car c'est durant cette période que se déroule l'excellent festival de cinéma Hallucinations collectives.

Hallucinations collectives est un festival organisé chaque année au cinéma Le Comoedia par une association de passionnés, Zonebis.zonebis

Pour reprendre les termes de la présentation de cette deuxième édition sur son site Internet, Hallucinations collectives cherche à faire découvrir aux spectateurs des « films oubliés », des « nouveautés frapadingues » et le tout avec des « invités iconoclastes ».

Pour ma part, j'ai pris plaisir pendant le week-end pascal à assister à la bagatelle de onze films (sur un total de vingt trois longs-métrages projetés), constitués d'avant-premières ou de films rares. Tous ont fait l'objet de présentations qui augmentaient l'envie de regarder ces films.

Le plaisir de participer à Hallucinations collectives a été décuplé par le fait de pouvoir discuter aussi bien avec les membres de Zonebis qu'avec des spectateurs ravis par le programme du festival.

Il est toujours appréciable de pouvoir discuter de cinéma avec des gens qui apprécient toutes sortes de films

Avant de procéder à la critique de chaque film visionné, un rapide bilan s'impose. A cet effet, il convient de noter la grande qualité globale de ce festival.

Au niveau des avant-premières, j'ai eu l'occasion de découvrir le très intéressant film Red state de Kevin Smith qui tire à boulets rouges sur les travers de la société américaine. Ce film était personnellement mon favori pour remporter le prix du meilleur long-métrage.

J'aurais également mis quelques pièces sur la comédie frapa-dingue Detention (une sacrée exclusivité!) de Joseph Kahn qui n'est pas piquée des hannetons et se révèle sans conteste le film le plus « hallucinant » de la sélection.

Au rang des satisfactions, on compte aussi deux films post-apocalyptiques : le très maîtrisé Hell du jeune suisse allemand Tim Fehlbaum et le très sombre The divide de Xavier Gens.

The theatre bizarre n'est pas mal non plus, même si les sketchs de ce film qui rend hommage au grand-guignol sont de niveau très variables.

En fait, le seul film qui m'a déçu est le polar atypique Kill list qui souffre d'un défaut de rythme et d'une fin incongrue. Ce film n'a manifestement pas déplu à tout le monde puisque le jury d'Hallucinations collectives lui a délivré le prix du meilleur long-métrage.

Hallujury Du côté des films remis au goût du jour l'espace d'une séance, Hardware et Dust devil de Richard Stanley ont représenté de véritables expériences. Ces films ont été d'autant plus plaisants à voir que chaque film a été précédé d'une présentation par Richard Stanley, invité d'honneur du festival. Ce dernier s'est d'ailleurs montré très disponible sur le festival, étant toujours prêt à répondre très gentiment aux questions des spectateurs.

Dans le style des curiosités qui marquent durablement la rétine, Schizophrenia obtient sans nul doute la palme. Ce film qui se focalise sur le quotidien d'un serial-killer est très malaisant par son aspect documentaire très réaliste.

Le film Les lèvres rouges, qui s'inscrivait dans la rétrospective La Belgique interdite, propose pour sa part une œuvre fantastique très étrange, qui se démarque des films de vampires des années 70.

De manière plus conventionnelle, j'ai revu sur grand écran l'excellent Total recall de Paul Verhoeven, qui faisait partie de la rétrospective dédiée à Philip K. Dick.

Comme l'année précédente, les longs-métrages en compétition ont été précédés de courts tout à fait plaisants à regarder. On pourra notamment signaler le déjanté A function, qui est caractéristique du style gore et décomplexé de la Corée du Sud. Sa jeune réalisatrice a bien mérité le prix du meilleur court-métrage. Signalons aussi la grande maîtrise formelle du court nommé Hope de Pedro Pires (Canada) qui avait remporté le grand prix au PIFFF.

En somme, le cru 2012 du festival Hallucinations collectives a été très bon, comme le prouvent les critiques des différents films visionnés, qui figurent ci-dessous.

On attend désormais qu'une chose : revenir sur ce festival qui aura lieu pour sa prochaine édition du 28 mars au 1er avril 2013, au cinéma Le Comoedia à Lyon.

Vous savez donc quelles dates sont à bloquer sur votre agenda l'année prochaine !

 

Les séances du samedi 7 avril 2012 :

 

hell21) Hell (2011, Allemagne) de Tim Fehlbaum :

La critique du film :

Hell n'est pas à confondre avec le film du japonaisNobuo Nakagawa qui avait été présenté au festival du NIFFF en 2008. Il s'agit ici du film de fin d'étude du suisse allemand Tim Fehlbaum. Pour autant, pour un premier film, le moins que l'on puisse dire c'est que Hell est un film particulièrement maîtrisé, notamment d'un point de vue formel.

Hell est un long-métrage post-apocalyptique. En seulement 4 ans (le film a lieu en 2016), le monde a complètement changé. La température du globe a monté de 10 degrés. La vie est devenu très difficile, et ce d'autant plus que l'ordre social a disparu.

Tim Fehlbaum ne s’embarrasse pas de considérations sociales comme dans La route de John Hillcoat ou Stake land. Son film va droit à l'essentiel. Il s'agit avant tout pour les principaux protagonistes de survivre dans ce monde chaotique.

Et le réalisateur évoque très bien cette question. D'abord, grâce à une photographie bien adaptée où les couleurs saturées étayent l'idée que le soleil est dangereux. Tourné en Corse dans des forêts calcinées, Hell est bien un enfer pour les survivants, comme le prouve cet horizon qui est bouché par un soleil aveuglant. Mais Hell est aussi et surtout un enfer car notre Terre est devenue un monde chaotique où c'est la loi du plus fort qui a cours. Les personnages du film doivent donc tout faire pour se tirer d'affaire, notamment face à des cannibales.

On notera que si le film ne joue pas fondamentalement sur les rapports humains, il a tout de même le mérite de rappeler, à l'instar de l’œuvre de George A. Romero, que l'humanité des gens est révélée dans ces épreuves de survie.

Sans être d'une folle originalité, voilà le premier film d'un jeune réalisateur prometteur qui mérite largement d'être vu.

Mon avis en quelques mots : un film post-apocalyptique sombre tant sur le fond que sur la forme.

 

hardware2) Hardware (1990, Angleterre) de Richard Stanley :

Le cinéaste sud-africain Richard Stanley a été l'invité de marque de ces Hallucinations collectives. On ne peut que féliciter l'organisation du festival d'avoir permis la présence de ce réalisateur. Avant le film, Richard Stanley a évoqué son film, notamment en faisant un parallèle entre Hardware et notre société actuelle quant à de l'utilisation des drones. Pour le cinéaste, depuis qu'il a fait son film il y a vingt deux ans, « beaucoup de choses ont changé mais pas assez de choses. »

La critique du film :

Réalisé en 1990 par le très rare Richard Stanley – auteur de deux longs-métrages dans toute sa carrière – Hardware est un film de science-fiction post-apocalyptique où le monde actuel n'existe plus. Des radiations ont contaminé un grand nombre de personnes. Sans compter que les survivants doivent faire avec un climat caniculaire.

Le film se retrouve dans la tendance d'un Terminator ou des films de ce type. En effet, on va assister à des combats entre l'Homme et un robot extrêmement dangereux qui parvient à se reconstituer.

Cela étant dit, à la différence de films qui jouent uniquement sur le côté « actioner », Richard Stanley émaille son film de considérations politiques où il semble nous mettre en garde contre l'évolution de notre société. Il y a d'une part une critique contre le tout électronique avec par exemple plusieurs éléments de l'appartement de l’héroïne (la bouilloire, les portes) sont reliées à un unique terminal. En cas de dysfonctionnement ou d'attaque par un hacker, il risque d'y avoir un problème.

D'autre part, Richard Stanley profite de son film pour descendre en flèche la politique militaire des Etats-Unis. Ce robot, le MARK13, quasi indestructible et qui tue n'importe quelle présence vivante qui se trouve sur son chemin, est un véritable danger. On peut au passage faire un parallèle entre ce robot et entre les fameux « dommages collatéraux » causés par des bombes téléguidées lors de guerres bien réelles.

De plus, le film se révèle extrêmement pessimiste quant à la survie du genre humain avec par exemple ce décret qui interdit aux gens d'avoir des enfants et par extension cette phrase de l’héroïne du film qui déclare qu'il est « stupide, suicidaire et sadique d'avoir des enfants en ce moment. »

Très joliment filmé et bénéficiant d'une belle photographie, Hardware est un film d'action intelligent, ce qui lui permet d'ailleurs de ne pas souffrir du poids des années.

Mon avis en quelques mots : un film post-apocalyptique prenant et délivrant un message politique.

 

kill list3) Kill list (2011, Angleterre) de Ben Wheatley :

La critique du film :

Kill list est un polar qui a au moins un mérite : celui de l'originalité. Son réalisateur, le jeune Ben Wheatley, commence par dresser le portrait d'un couple marié, Jay et Jill, qui est en crise et en difficultés sur le plan matériel. Ces difficultés de Jay sur le plan économique expliquent pourquoi il accepte avec son meilleur ami, Sam, une mission où il s'agit de tuer des personnes signalées par un employeur mystérieux.

Le film joue à fond la carte du mélange des genres avec des moments comiques (la fête au début du film ; la façon dont Jay s'en prend à un catholique dans un restaurant) qui alternent avec des moments plus dramatiques. Dans un film à l'ambiance décontractée, on est surpris par les excès de violence, en particulier lorsque Jay tue de façon atroce une de ses victimes avec un marteau. La folie de Jay est tout à fait hallucinante, à tel point que ce personnage se révèle ambigu. Est-il fou ?

Si Kill list peut se targuer de qualités certaines – mélange des genres, excès inattendus de violence – il a malheureusement des défauts qui plombent quelque peu le plaisir que l'on a à regarder ce film. Le film manque ainsi de rythme. On est certes réveillé par les scènes violentes du film mais par moments on s'ennuie un peu. Surtout, les tenants et les aboutissants du film ne sont pas clairs et finissent par le desservir. On ne sait pas grand chose des fameuses victimes. On ne sait pas clairement ce qui leur est reproché (l'exemple le plus significatif est celui du prêtre qui semble assassiné de façon totalement gratuite) et encore moins pourquoi ces personnes remercient Jay lorsqu'elles se font tuer. Certes, il est parfois utile de ne pas tout dévoiler mais dans le cas présent il manque des clés de compréhension.

Dans le même ordre d'idée, les éléments qui rappellent Eyes wide shut, mais aussi les mœurs païens qui évoquent l'excellent A wicker man, auraient pu être développés au lieu de consister en une simple rupture scénaristique du film.

De plus, la fin du film part complètement en vrille en donnant l'impression que le réalisateur Ben Wheatley cherche à tout prix à choquer le spectateur, quitte à lui montrer des scènes proches du ridicule. La dernière action de Jay n'est pas sans rappeler les agissements du personnage principal du plus que douteux A serbian film.

Tout cela est bien dommage car le film dispose d'une distribution solide et d'une mise en scène efficace.

Mon avis en quelques mots : un polar original qui, à trop vouloir surprendre le spectateur, finit par le décevoir.

 

 

Les séances du dimanche 8 avril 2012 :

 

dustdevil1) Dust devil (1992, Angleterre) de Richard Stanley :

Dust devil a été introduit par Richard Stanley qui a évoqué le fait divers à l'origine du film et les galères qu'il a rencontrées lors du tournage.

Le film a par ailleurs été présenté en VO dans sa version director's cut, remontée en 2006.

La critique du film :

Deuxième et dernier long métrage à ce jour de l'excellent Richard Stanley, Dust devil est un film sur serial-killer complètement atypique et unique en son genre.

Le film se base sur un fait divers où un meurtrier en Namibie était introuvable et était considéré comme une sorte de démon qui voyageait par le vent. A partir de cette histoire, Richard Stanley livre un film à l'ambiance étrange. On est tout à la fois dans un film fantastique, dans un film ésotérique et dans un film de serial-killer.

Le film bénéficie de l'interprétation impressionnante de l'acteur Douglas Burke, qui joue le rôle du démon. L'acteur a une présence magnétique, un charisme incroyable qui fait que l'on est sans cesse en train de se demander ce qui va se passer lorsqu'on le voit à l'écran. Car le démon n'est pas un tendre : il fait de l'auto-stop et tue ses victimes, parfois après avoir fait l'amour avec celles-ci. Le premier meurtre est d'ailleurs bien caractéristique du film avec un meurtre brutal qui fait suite à une très belle scène d'amour, superbement filmée. Le démon se sert du sang de sa victime pour faire de curieux dessins sur les murs de la maison de la personne tuée. Ce qui entretient le côté étrange de ce film.

Mais surtout c'est la relation particulière entre le démon et la belle Wendy Robinson (interprétée par l'actrice Chelsea Field) qui retient l'attention. On a d'un côté une femme désabusée qui a quitté son fiancé et songe même à mettre fin à ses jours, et de l'autre un démon qui lui fait l'amour avant de jouer avec elle au jeu du chat et de la souris.

Disposant de plusieurs niveaux de lecture, Dust devil est superbement filmé avec en particulier de très beaux plans plans-séquence qui donnent une vraie dynamique à ce long métrage. C'est donc un film qui est d'autant plus appréciable à regarder dans une salle de cinéma.

Mon avis en quelques mots : Un film fantastique très réussi sur une entité démoniaque insaisissable.

 

red state2) Red state (2011, Etats-Unis) de Kevin Smith :

La critique du film :

S'étant fait connaître avec la comédie Clerks, Kevin Smith a depuis dû essuyer quelques revers commerciaux, avec dernièrement le pourtant fort sympathique Zack et Miri tournent un porno. Avec Red state, Kevin Smith a décidé de tourner une œuvre sans concessions.

Le moins que l'on puisse dire c'est que le cinéaste n'y va pas de main morte. Le début du film montre trois jeunes adolescents américains qui n'ont aucune expérience au niveau du sexe et qui entendent se faire dépuceler. Avec des blagues potaches caractéristiques du cinéma de Kevin Smith, on sent que l'ambiance est décontractée.

Pourtant, les choses vont nettement se corser pour nos trois jeunes puisqu'ils vont tomber dans le piège tendu par une femme qui joue le rôle d'un appât. Si de prime abord on aurait pu s'attendre à une sorte de Hostel bis, il n'en est rien. Ici, il n'est pas question de pervers qui aiment faire souffrir les gens mais plutôt d'extrémistes religieux qui trouvent qu'en dehors de chez eux, « il n'y a qu'un monde d'ordures ». Le cinéaste Kevin Smith insiste pendant de longues minutes sur le sermon du pasteur qui est le chef de ces extrémistes, pour montrer – sous les oripeaux de la Bible – à quel point il est radical et qu'il dispose à ses côtés de fidèles qui ont été endoctrinés. Dans ces conditions, difficile pour nos trois jeunes de s'en sortir.

Heureusement, si l'on peut dire, alors que les choses paraissent désespérées, nos adolescents voient arriver les secours, à savoir l'armée. Sauf qu'elle commet une bévue en tuant l'un des jeunes et décide alors de tuer quasiment tout le monde, en faisant croire à des terroristes. Les séquences de meurtres des jeunes qui avaient choisi de se rendre sont proprement révoltantes et constituent des scènes marquantes.

Finalement, Kevin Smith renvoie tout le monde – la politique, la religion et les forces de l'ordre – dos à dos et nous rappelle que l'Amérique post- 11 septembre est loin d'avoir pansé ses plaies. Voilà sans conteste l'un des films les plus forts de la sélection officielle du festival.

Mon avis en quelques mots : Un brûlot politique qui tire sur tout ce qui bouge avec un talent certain.

 

schizophreniaa3) Schizophrenia (Autriche, 1983) de Gérald Kargl :

Lors de cette séance on a eu droit à la version intégrale du film.

La critique du film :

Les films qui traitent de serial-killer sont légion, mais tous ne sont pas forcément de qualité équivalente. Dans le registre des films radicaux, on connaît entre autres Maniac, Henry portrait d'un serial killer ou encore Schramm du trop rare Jörg Buttgereit.

Le film Schizophrenia de l'autrichien Gérald Kargl fait partie de la veine de ces films sans concessions, qui nous confrontent au quotidien du psychopathe.

Mais Schizophrenia a sûrement un avantage sur les films précités, c'est qu'il va plus loin dans le réalisme.

Deux éléments dans le film sont remarquables sur ce point : d'une part, les différents méfaits commis par le tueur sont expliqués, et justifient les raisons pour lesquelles il a passé jusque-là près de la moitié de sa vie en prison.

D'autre part, et c'est sans conteste le grand apport de Schizophrenia, l'enfance et l'adolescence du tueur nous sont racontées en voix off par celui-ci tout au long du film. On apprend toutes sortes de choses sur la façon dont il pense, et notamment son goût immodéré à faire souffrir les gens et à voir dans leurs yeux un sentiment de peur.

Dans Schizophrenia, le serial-killer, qui ressemble à monsieur-tout-le-monde, est un jeune homme qui va prendre un malin plaisir à tuer toute une famille – une vieille dame et ses deux enfants – sans autre raison que celle de satisfaire son envie de meurtre.

Le spectateur est d'autant plus au cœur de cette action macabre que le réalisateur Gérald Kargl a fait le choix d'une mise en scène très fluide où il alterne plans larges et plans rapprochés de façon très judicieuse. Par ailleurs, une caméra a été fixée sur un harnais face à l'acteur pour accroître le côté désorienté du personnage principal.

Prenant quasiment la forme d'un documentaire sur un serial-killer, Schizophrenia est un film qui mérite très largement d'être vu, même s'il est clair que c'est un film à déconseiller aux âmes sensibles.

Mon avis en quelques mots : Un film qui amène le spectateur au plus proche du quotidien d'un psychopathe. Une rareté incontournable.

 

the theatre bizarre4) The theatre bizarre (2011, France / Etats-Unis) de Richard Stanley, Buddy Giovinazzo, Tom Savini, Douglas Buck, Karim Hussain, David Gregory et Jeremy Kasten :

La critique du film :

A la base de The theatre bizarre, il y a un projet de David Gregory qui a proposé à des cinéastes qui ont déjà fait leurs preuves, de mettre en scène une histoire horrifique d'une durée maximum de 20 minutes et pour un budget n'excédant par 20 000 dollars.

The theatre bizarre entend raviver l'esprit du grand-guignol à la française. Le résultat est dans l'ensemble satisfaisant. Sur les sept histoires, cinq m'ont paru plaisantes, avec bien entendu des degrés divers d'intérêt.

Au chapitre des satisfactions, signalons notamment le segment mis en scène par Tom Savini. Celui qui s'est fait principalement connaître grâce aux maquillages dans les films de zombies de George A. Romero, livre ici un film bien sarcastique sur l'infidélité, dans la lignée des contes de la crypte. Il joue sur la notion de rêve et de réalité pour proposer des rebondissements à son histoire. C'est à mon sens le meilleur segment de The theatre bizarre.

D'autres sont tout à fait recommandables. On a ainsi Sweets de David Gregory – qui a su tiré parti de son projet de The theatre bizarre – avec une variation intéressante des films La grande bouffe et Le cuisinier, le voleur, sa femme et son enfant, le tout dans des couleurs pop particulièrement vives. Le sketch de Karim Hussain, avec une jeune femme qui récupère les visions des autres, est tout à la fois original et difficilement soutenable par instants (ah, l'injection d'une seringue dans l’œil). Les sketchs de Richard Stanley et de Buddy Giovanazzo, respectivement sur une histoire de sorcellerie et sur un couple en crise, sont sympathiques, même s'ils manquent cruellement d'originalité.

Au niveau des déceptions, on pourra signaler, outre des liens entre les sketchs qui sont quelque peu factices, le sketch de Douglas Buck, certainement sur le papier le cinéaste le plus intéressant (il n'y a qu'à voir son film A family portraits), qui livre ici un sketch ennuyeux sur la notion de mort qui est expliquée par une mère à sa fille.

Mon avis en quelques mots : Le retour du grand-guignol à travers sept sketchs satisfaisants mais inégaux.

 

 

Les séances du lundi 9 avril 2012 :

 

total recall1) Total recall (1990, Etats-Unis) de Paul Verhoeven :

La critique du film :

Total recall constitue l'adaptation d'une courte nouvelle de Philip K. Dick. Après avoir été confié un temps à David Cronenberg, le film Total recall a finalement été mis en scène par Paul Verhoeven qui s'était fait précédemment remarqué par son très violent Robocop (1987).

Total recall étant d'une part réalisé par un cinéaste européen connu pour sa violence – et donc a priori pas vraiment cérébral – et d'autre part conçu comme un véritable blockbuster, le risque était grand de voir tout l'aspect psychologique de la nouvelle, caractéristique de l’œuvre de Philip K. Dick, gommé d'un seul trait.

Cet écueil a été totalement évité. Paul Verhoeven a su marier avec talent deux éléments qui peuvent paraître antinomiques : l'action et le psychologique.

Le musculeux Arnold Schwarzenegger (Schwarzi pour les intimes) interprète le rôle principal du film, celui de Douglas Quaid, un homme qui pense être un ouvrier de chantier mais qui est en fin de compte Hauser, un agent des services secrets dont on a effacé la mémoire.

Le film se déroule à un rythme soutenu, avec un Schwarzenegger qui court dans tous les sens pour tenter de découvrir la vérité. Les combats à mains nues, les fusillades, les destructions et meurtres sont nombreux dans Total recall.

Pour autant, si le côté action est très présent, Paul Verhoeven n'a pas négligé l'aspect psychologique. Et précisément c'est tout le côté paranoïaque – un thème fondamental chez Philip K. Dick – qui est mis en exergue. En effet, à plusieurs reprises, Douglas Quaidest ballotté au gré des événements, ne sachant pas toujours à qui se fier. Il faut dire que tout cela fait partie d'un plan qui avait été prémédité par Hauser.

Ce point est fondamental car au-delà des multiples rebondissements qui marquent le film, c'est toute la notion de héros qui pose question dans Total recall. Certes, Douglas Quaidest prêt à sauver le monde et à se rallier du côté des gens qui sont opprimés, mais à la base c'est la même personne, à savoir Hauser, qui avait préparé un plan machiavélique. Ce n'est qu'après son lavage de cerveau qu'il se révèle en tant que héros. Cela amène donc à rester très mesuré sur la notion de héros.

Au final, voilà un film d'excellente facture qui n'a pas vieilli et qui fait toujours autant plaisir à voir.

Mon avis en quelques mots : un excellent blockbuster qui offre une réflexion sur la question de l'identité.

 

Les levres rouges2) Les lèvres rouges (1972, Belgique / France / Allemagne) d'Harry Kümel :

La critique du film :

Réalisé par Harry Kümel en 1972 dont c'était alors la première incursion dans le genre horrifique, Les lèvres rouges est un film complètement atypique. En effet, à une époque où les films de la firme Hammer constituent les standards des films de vampires, Les lèvres rouges apparaît comme une véritable curiosité.

D'abord, le film mélange deux mythes : d'une part, celui des vampires et d'autre celui de la sanguinaire Elizabeth Bathory, qui ont comme chose commune le fait que ces personnages boivent le sang de leurs victimes et restent éternellement jeunes.

Ensuite, ce film entretient un certain mystère. En effet, on se doute fortement que la comtesse Bathory et sa fidèle Ilona sont des vampires. Mais on en a pas la certitude. D'ailleurs, le réalisateur a évité de montrer durant tout le film les fameuses canines caractéristiques des vampires.

Les lèvres de sang est un film original qui ne plaira pas à tous les amateurs d'horreur. En effet, son rythme est plutôt lent et il est clair qu'il faut adhérer à l'ambiance spéciale qui se dégage de ce long métrage.

On constatera que certains éléments propres aux années 70 sont clairement mis en avant dans ce film. Ainsi, le film comporte plusieurs scènes érotiques, et ce dès le début du film où l'on voit un couple de jeunes mariés, Stefan et Valerie (deux des principaux protagonistes du film) en train de faire l'amour. On assiste même dans Les lèvres de sang à un érotisme lesbien dans le rapport qu'il y a entre la comtesse Bathory et Ilona mais aussi dans le rapport qu'il y a entre Bathory et Valerie.

Il est important de noter que l'une des réussites certaines de ce film est sa mise en scène et sa belle photographie où la couleur rouge est mise en avant. Sur ce point, on a droit à des fondus au rouge qui se révèlent pertinents et à des habits des protagonistes qui insistent sur cette couleur (la comtesse Bathory a une robe rouge, des ongles rouges et du rouge sur ses lèvres ; Stéphane a un peignoir rouge et porte un pull rouge).

Film de genre quelque peu déroutant, Les lèvres rouges est sans conteste une œuvre originale à voir.

Mon avis en quelques mots : Un curieux film de vampires des années 70 qui dégage une atmosphère particulière.

 

The Divide3) The divide (2011, France) de Xavier Gens :

Le film a été présenté par Xavier Gens en personne, pour la première fois dans sa version director's cut, plus longue de 15 minutes par rapport au premier montage.

La critique du film :

Auteur du film Frontières qui n'hésitait pas à faire preuve d'un jusqu'au-boutisme certain au niveau de l'horreur, Xavier Gens propose avec The divide son nouveau long métrage.

Le film ne joue pas forcément la carte de l'originalité puisqu'il s'agit d'un film post-apocalyptique. En revanche, il a le mérite d'être assez efficace. Xavier Gens ne s'embarrasse pas à donner des explications sur le changement de notre monde. Lors d'une scène d'introduction menée tambour battant, on comprend que c'est le chaos avec des bâtiments qui explosent de partout. Des survivants partent alors se réfugier dans un abri. A partir de là, l'intrigue va être particulièrement ramassée.

Hormis une scène où le réalisateur ouvre une piste avec des hommes portant des combinaisons qui procèdent à d'étranges expériences dans un laboratoire attenant à l'abri, le film se focalise sur les rapports entre les survivants.

Même si au départ The divide peut donner l'impression de tourner un peu en rond, il n'en est rien. Avec des plans qui ont le mérite d'être moins « cut » que dans Frontières, Xavier Gens marque progressivement la dégradation des relations entre les différents personnages, jusqu'à la formation de véritables clans.

Dans un environnement clos où il est avant tout question de survie, certaines personnes se comportent de manière pire que celle d'animaux.

La tension est de plus en plus palpable dans The divide. D'ailleurs, l'horreur psychologique et l'horreur physique sont de plus en plus présentes.

Le film ne laisse guère de place à l'optimisme, à l'image de l'acte final de son héroïne qui choisit la carte de l'individualisme pour s'en sortir.

Plutôt bien filmé et bénéficiant d'une distribution de qualité – on retrouve avec plaisir Michael Biehn et Rosanna Arquette – The divide est sans conteste à ce jour le meilleur film de Xavier Gens.

Mon avis en quelques mots : Un huis-clos oppressant qui met l'homme au révélateur lorsqu'il s'agit de survivre.

 

detention4) Detention (2011, Etats-Unis) de Joseph Kahn :

La critique du film :

La diffusion de Detention constitue une sacrée exclusivité car jusque-là le film n'a bénéficié que d'une seule diffusion en France, au PIFFF.

Pour parodier une célèbre série d'animation datée de 1989, avec Detention le lycée est « fou, fou, fou ». Car Detention constitue un long métrage survitaminé qui va à cent à l'heure. Son réalisateur, Joseph Kahn, auteur de Torque, parvient à mettre en scène une comédie horrifique dans le milieu lycée américain où les moments humoristiques se succèdent à vitesse grand V.

Certes, le fond du film n'est pas très fin puisqu'il s'amuse avant tout à parodier les films dans le style de Scream (le mystérieux tueur) et les films de John Hugues (le couple constitué des personnages Clapton Davis et Riley Jones).

Quoi qu'il en soit, Detention fait plaisir au spectateur par l'aspect très coloré de l'ensemble et par le côté délirant des personnages qui n'est pas sans rappeler certaines séries télé pour adolescents tel que Parker Lewis ne perd jamais.

Le film comporte des dialogues complètement délirants et des créations visuelles tout aussi hallucinantes. La scène de la retenue (qui constitue le titre du film en anglais) est de ce point de vue extrêmement drôle, par le biais d'un flashback musical qui vaut le détour.

Joseph Kahn s'amuse même à proposer une interaction avec le spectateur, comme lors de cette scène où il est indiqué que « le film Detention est contre l'alcool au volant, même si vous êtes suicidaire » lorsqu'un père de famille alcoolique refuse d'amener sa fille à l'école. Joseph Kahn en profite aussi pour se venger, se moquant de son premier film Torque (où il avait été contraint par les producteurs à faire des choses qu'il ne souhaitait pas) lorsqu'un étudiant évoque dans Detention « une débilité de film, Torque. »

Les blagues dans le film sont tellement nombreuses que l'on a parfois du mal à suivre et à tout comprendre. Ce qui est en soi un peu dommage.

Au final, Detention est épuisant mais l'ambiance qui s'en dégage est tellement cool et décontractée que l'on est heureux après avoir vu ce film.

Mon avis en quelques mots : Une comédie adolescente survoltée, qui part dans tous les sens.

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