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Déjantés du ciné
26 mars 2019

Us de Jordan Peele

us1Titre du film : Us

Réalisateur : Jordan Peele

Année : 2019

0rigine : Etats-Unis

Durée : 1h56

Avec : Lupita Nyong’o, Winston Duke, Elisabeth Moss, Tim Heidecker, etc.

FICHE IMDB

Synopsis : De retour dans sa maison d’enfance, à Santa Cruz sur la côte Californienne, Adelaïde Wilson a décidé de passer des vacances de rêves avec son mari Gabe et leurs deux enfants : Zora et Jason. Un traumatisme aussi mystérieux qu’irrésolu refait surface suite à une série d’étranges coïncidences.

 

Le réalisateur américain Jordan Peele avait été particulièrement remarqué après son premier long métrage, Get out (2017), film d’horreur pointant du doigt le racisme ordinaire et menant le spectateur vers des contrées bien étranges. Doté d’un scénario retors, Get out se révèle très efficace et marquant. Le film a d’ailleurs rencontré un grand succès, puisque avec un budget de seulement 4,5 millions de dollars, il en a rapporté plus de 175 millions rien qu’aux Etats-Unis.

Pour son second film, Jordan Peele a bénéficié d’un budget bien plus confortable, y compris au niveau de la publicité. Le film a d’ailleurs une ambition plus importante que Get out. Pour Us, on suit une famille afro-américaine, les Wilson, passant leurs vacances dans une belle résidence à Santa Cruz, sur la côte californienne. Tout semble au beau fixe, mais la mère de famille, Adélaïde, n’est pas sereine. Elle a toujours à l’esprit un traumatisme vécu dans son enfance (superbe séquence initiale), qui vient régulièrement la hanter. Elle ne se sent pas bien dans cette maison et souhaite s’en aller.

us2Les événements ne vont pas tarder à lui donner raison. La nuit, quatre inconnus se présentent devant leur résidence et ne sont pas animés des meilleures intentions du monde. On pense alors que le film va virer au simple « home invasion ». Mais non, Jordan Peele a des intentions plus élevées pour Us. Car les Wilson vont devoir affronter leurs doubles maléfiques, tout de rouge vêtus et munis de ciseaux. C’est comme si le croque-mitaine prenait notre apparence et s’attaquait à nous.

Voilà un pitch de départ tout à fait intéressant. Surtout que Jordan Peele a la bonne idée d’élargir sa cible. Les Wilson ne seront pas les seuls à subir les affres de leurs doubles. Le film prend alors une tonalité plus universelle. La bourgeoisie en prend pour son grade, qu’elle soit blanche ou noire. A sa façon, le réalisateur s’en prend à une Amérique (mais le constat pourrait être le même en France) à deux vitesses avec d’un côté les nantis et de l’autre les prolétaires. Le titre du film, Us, prend alors tout son sens. On peut évidemment le traduire de manière basique par le terme « nous » puisque les protagonistes doivent affronter leurs doubles. Mais ce Us fait également référence à autre chose. Quand l’héroïne, Adélaïde, demande à son double ce qu’ils sont, elle obtient la réponse suivante : « Des Américains ». Eh oui, Us c’est aussi United States, à savoir les Etats-Unis qui ne sont pas uniquement la nation des nantis mais aussi celle de laissés-pour-compte qui ont sombré dans la misère.

Le film est d’ailleurs rempli de symboles – que l’on ne peut pas tous évoquer car l’effet de surprise est important quand on le voit pour la première fois – à commencer par cette cage de lapin au tout début. On ne saisit pas immédiatement le message mais il est évident que c’est une façon de dire que des personnes sont enfermées dans leur quotidien. De la même façon, les chaînes humaines, que l’on observe à plusieurs reprises, délimitent une fois de plus l’Amérique en deux camps : les riches/les pauvres, les Blancs/les Noirs (le racisme est toujours présent), le Nord / le Sud.

Sous ses dehors de film d’horreur, Jordan Peele dresse le portrait d’une Amérique plus divisée que jamais (peut-être fait-il référence aux pro et anti Trump), et n’hésite pas à s’attaquer à un passé bien lourd à assumer (le massacre des Indiens, l’esclavage des Noirs, etc.).

us4Us est donc un film bien plus subtil qu’il n’y paraît, et à même de satisfaire plusieurs types de publics. Les amateurs de thrillers/films d’horreur y trouveront leur compte car les scènes horrifiques sont nombreuses (et parfois abruptes) tout comme les multiples rebondissements (Jordan Peele s’amuse jusqu’au bout avec le spectateur). D’autres pourront y voir une réflexion pertinente sur la société américaine, ne parvenant pas à se défaire des fantômes de son passé.

Sur le plan de la mise en scène, Jordan Peele opte dans les scènes d’effroi pour des mouvements de caméra amples, dynamiques (plusieurs travellings). Par ailleurs, Peele place ses personnages au cœur de son histoire : il cadre à de nombreuses reprises sur le visage particulièrement expressif de ses acteurs et actrices.

A ce sujet, la distribution fonctionne à merveille et on retient notamment la composition de l’excellente Lupita Nyong’o (12 years a slave), jouant son rôle et aussi celui de son double ! On retrouve également avec plaisir dans ce film Elisabeth Moss, l’actrice de la série déjà culte The handmaid’s tale, où elle interprète une femme privée dans ses libertés et même réduite à un esclavage sexuel dans un monde dystopique. Pas étonnant que Jordan Peele ait pensé à elle. Encore un symbole.

Vous l’aurez compris, Us est une œuvre hautement recommandable.

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