Lebanon de Samuel Maoz
Année : 2010
Origine : Israël
Durée : 92 minutes
Avec : Yoav Donat, Itay Tiran, Oshri Cohen, Michael Moshonov, etc.
Résumé : La guerre du Liban vécue par les occupants d'un char israélien.
Décidément les films de guerre sont très en vogue actuellement. Et plus
précisément les films à connotation politique forte. Avec Démineurs,
Kathryn Bigelow (récompensée de plusieurs oscars) avait
ouvert la voie du film de guerre particulièrement réaliste.
Avec Lebanon, le cinéaste Samuel Maoz, qui s'est basé sur des souvenirs
personnels, en vient pour sa part à évoquer la guerre de Liban en 1982.
Cette guerre est donc une nouvelle fois sous les feux de l'actualité
après l'excellent film d'animation Valse avec Bachir. Dans le cas
présent, si le sujet est fictionnel, le spectateur a tout de même bien
l'impression de vivre les événements. Le spectateur est clairement
positionné en première ligne, comme il l'était déjà avec Démineurs.
Le sujet du film est relativement simple, ce qui ne l'empêche pas d'être
efficace. Il s'agit d'un huis clos avec des soldats israéliens qui se
trouvent à l'intérieur d'un tank et ont pour but de remplir leur
mission, qui revient à tuer des gens. L'originalité du film tient au
fait que l'on ne vient ce qui se passe à l'extérieur du tank que par le
biais du viseur du canon du tank.
Une des inscriptions que l'on trouve à l'intérieur indique que « l'homme
est d'acier, le tank n'est que ferraille ». Comme on peut fortement
s'en douter, cette idée va voler en éclats. Déjà premier rappel, la
guerre n'est pas un amusement. C'est quelque chose d'horrible, ne
serait-ce que sur le plan visuel. Avec Lebanon, on est très loin des
films d'action américains où la mort n'est jamais pointé du doigt et où
elle sert tout simplement de moyen pour relancer l'action. Ici chaque
mort a quelque chose d'horrible et d'injuste. On voit clairement par le
biais du viseur du canon du tank et donc par l'action de ces soldats que
les meurtres peuvent frapper n'importe qui, a fortiori des civils
innocents ce qui est d'autant plus horrible.
Une guerre est quelque chose de moche et le cinéaste Samuel Maoz ne fait
pas de fioritures dans sa description : on voit ainsi un homme qui a
perdu ses jambes et un bras et que l'on achève brutalement. On a
l'impression que tout type de personne qui se trouve sur le passage du
tank est susceptible de mourir. La mort est montrée telle qu'elle est.
Elle peut toucher tout le monde et les responsables sont les militaires.
Mais ces derniers sont loin d'être des personnages d'acier (comme on
pouvait le lire sur l'inscription du tank). Chacun d'entre eux a peur et
comme au début du film, il est difficile de décider de tuer un être
humain que l'on a juste en face de soi, même si l'on est installé dans
son tank et que l'on risque peu de choses. Ces militaires ont chacun
leur vie propre et ce combat qu'ils n'ont jamais demandé n'est pas
forcément une sinécure pour eux. Le réalisateur Samuel Maoz montre bien
la vie à l'intérieur du tank avec des tensions, des ordres, des
contre-ordres et surtout une volonté d'en finir au plus vite. Par le
biais d'un superbe travail sur l'éclairage, on voit ces militaires qui
ont chaud, qui transpirent. On ressent presque de l'intérieur les fumées
qui s'échappent du tank ou encore le bruit de ce dernier. On vit comme
si l'on était à la place des militaires et parfois la situation est loin
d'être évidente, notamment lorsque ces soldats doivent intégrer dans le
tank un soldat mort ou encore un prisonnier.
La tension qui se situe dans le tank essaie parfois d'être dédramatisée
par la parole, comme lorsque ce soldat raconte le moment où il a
rencontré une femme et a rencontré un grand bonheur d'être avec elle, à
tel point qu'il s'est bien laissé aller.
Cependant, malgré sa beauté formelle et son point de vue original
adopté, Lebanon n'est pas à mon sens dénué de défauts ou à tout le moins
il ne plaira pas à tous. Ce huis-clos est difficile d'accès par cette
mise en scène qui rend le film quelque peu aride et les différentes
scènes du film se révèlent tout de même quelque peu redondantes. Il faut
vraiment réussir à se plonger dans le film, sinon ce dernier, malgré sa
durée assez courte, pourra se révéler bien long.
Au final, Lebanon, qui est inspiré de la vie de son cinéaste, est un
film nécessaire qui montre parfaitement l'injustice et la bêtise de la
guerre. Rien que pour cela, il mérite le Lion d'Or à Venise qu'il a
obtenu en 2009.