The duchess de Saul Dibb
Réalisé par Saul Dibb
Année : 2008
Origine : Royaume-Uni
Avec : Keira Knightley, Ralph Fiennes, Charlotte Rampling...
Durée : 110 minutes
Résumé : La vie d'une duchesse, mariée à un homme qui ne l'aime et éprise d'un autre.
Réalisé par l'anglais Saul Dibb, The duchess est un drame romanesque en costumes. Adaptation d'un roman (qui se base sur des faits réels) d'Amanda Foreman devenu un best-seller Outre-Manche, The duchess raconte l'histoire d'une femme, Georgiana Spencer (Keira kgnightley) qui s'est mariée très jeune avec le duc de Devonshire (Ralph Fiennes). Ne pouvant donner des enfants mâles à son époux, elle doit faire avec les relations extra-conjugales de ce dernier. Pour tenter de vivre sa vie, elle s'engage en politique où elle soutient la candidature de Charles Grey, jeune homme du parti libéral qu'elle a connu quelques années plus tôt.
The duchess est un film qui retrace parfaitement l'ambiance et les
moeurs de l'Angleterre du XVIIIème siècle. Et pas seulement en raison
des costumes, des beaux décors et de la musique classique (du
Beethoven, du Bach, du Vivaldi) que l'on entend tout au long du film.
The duchess évoque parfaitement la société anglaise de cette époque où
la liberté est extrêmement limitée.
La liberté est unilatérale : l'homme a tous les droits. La femme
n'existe que par rapport à l'homme. La femme est avant tout celle qui
va porter en elle la descendance de l'homme.
Le personnage peu sympathique du duc de Devonshire (incarné par un Ralph Fiennes aux antipodes des rôles romantiques qu'il interprète habituellement) est à ce propos un pur produit de son époque. Il ne s'est marié et ne souhaite qu'une chose de son épouse : qu'elle lui donne une descendance, mâle de surcroît. Dès ses premiers minutes, le film fait état d'une sorte de pacte qui est conclu entre le duc de Devonshire et la mère de Georgiana (jouée par Charlotte Rampling). Cette dernière s'engage oralement à ce que sa fille donne un fils au duc de Devonshire. C'est la condition pour que le mariage ait lieu. Dans cet entretien qui dénote des personnages d'une extrême froideur où le sentiment n'a pas sa place, la mère de Georgiana se porte garante de sa fille.
Et le film va s'attacher à nous étayer cette idée d'une société où la
femme n'existe que par rapport à l'homme. Pourtant, à l'instar de son
personnage d'Elizabeth Bennet dans Orgueil et préjugés (très beau film
de Joe Wright), Keira Knightley incarne une femme qui cherche l'amour
et qui est éprise de liberté.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle elle participe activement à la
campagne du jeune Charles Grey (joué par un Dominic Cooper un peu
fallot). Georgiana est d'ailleurs très lucide sur la notion de liberté,
comme lorsqu'elle s'adresse pour la première fois au libéral mister
Fox. Dans un discours d'une grande justesse, elle lui demande ce qu'est
la liberté si tout le monde n'y a pas droit. Elle prend l'exemple du
droit de vote qui est limité. Elle met cet exemple en parallèle avec
celui d'un mort : un homme mort peut-il être moyennement mort ?
Si le parti libéral, alors parti d'opposition, n'est que pour une
ouverture moyenne sur le droit de vote (auquel n'ont par exemple pas
accès les femmes), on comprend aisément pourquoi la révolution (qui n'a
pas encore eu lieu en France) est tant attendue par certains, notamment
en Angleterre.
Avant cela, le duc de Devonshire peut continuer à profiter de son
statut, qui fait de lui un homme riche et influent. En étant un homme,
il s'autorise des choses qu'il refuse à sa femme. Ainsi, il lui impose
la présence de sa maîtresse dans la demeure familiale. A contrario, la
duchesse ne peut ni coucher ni même seulement voir l'homme qu'elle aime
et qui l'aime. Une des réussites du film tient au déchirement provoqué
par cette histoire d'amour impossible.
La duchesse se bat contre cette injustice mais face à cette société où
les convenances sont primordiales et où l'homme est omnipotent, elle ne
peut pas faire grand chose.
Il n'est pas déraisonnable de faire un parallèle entre la situation de
la duchesse et celle de la princesse Lady Diana. En effet, l'une et
l'autre ont dû vivre aux côtés d'un homme qu'elles n'aiment pas et qui
ne les aiment pas. Par ailleurs, elles ont dû supporter une situation
d'adultère qui est devenue quasiment naturelle. Ainsi, elles ont dû
subir le même destin tragique (sans compter pour la duchesse de
Devonshire des fausses couches, un viol de la part de son époux ou
encore un enfant abandonné). En revanche, ces deux femmes étaient
adorées à leurs époques respectives par le peuple. En somme, ce n'est
pas forcément un hasard si Georgiana est
l'arrière-arrière-arrière-grand-tante de Lady Di.
Comme Lady Diana, Georgiana devient l'héroïne bien malgré elle d'une véritable tragédie. Le film retranscrit parfaitement le côté très conservateur d'une Angleterre où le raison prend inmanquablement le pas sur les sentiments. De son côté, Keira Knightley continue à interpréter avec force des rôles de femmes au destin tragique, comme cela avait déjà été le cas dans le très réussi Reviens-moi de Joe Wright, sorti sur les écrans au début de l'année 2008. Aux côtés de Keira Knightley, on retrouve dans le film La duchesse un Ralph Fiennes dans un rôle peu enviable. Il interprète un homme qui n'a rien pour lui sur le plan humain. Il n'a de sentiment pour personne et il ne s'intéresse à rien de particulier, hormis son idée fixe d'avoir comme descendance des enfants mâles. Cependant, le personnage joué par Ralph Fiennes est bien le personnage dominant car il possède deux facteurs qui sont essentiels à cette époque : c'est un homme et il est riche. Ralph Fiennes est de son côté parfaitement crédible dans le rôle de cet homme égocentrique, lequel est représentatif des mentalités de cette période de l'Histoire.
Au final, The duchess est un drame humain bien réalisé qui bénéficie, outre d'un scénario compétent, d'une distribution solide, de beaux décors et d'une BO en parfaite adéquation avec le film. Ce film a par ailleurs gagné l'oscar des meilleurs costumes. T